GUIDE À L'INTENTION DES
ENSEIGNANTS ET DES ENSEIGNANTES
1998
Dernière mise à jour: 31 mai, 2001
Réginald Grégoire inc.
et
Thérèse Laferrière
TABLEAU 1: | Thèmes de projets soutenus par le programme Rescol à la source | |
TABLEAU 2: | Aperçu des activités, des opérations et des réalisations possibles en classe et des acteurs en cause dans le cadre d'une approche par projet soutenue par des ordinateurs en réseau | |
TABLEAU 3: | Extension des relations de collaboration entre les acteurs associés à une approche par projet soutenue par des ordinateurs en réseau | |
TABLEAU 4: | Activités, opérations et résultats possibles à partir d'ordinateurs en réseau dans le cadre d'une approche par projet | |
FIGURE 1 : | Aperçu schématique de la démarche d'un projet |
Ce guide s'adresse aux enseignants et aux enseignantes qui ont déjà expérimenté l'approche par projet dans le cadre du programme Rescol à la source ou désirent s'engager dans des expériences plus ou moins semblables avec leurs élèves. Plus précisément, ce qu'il propose, c'est une approche où, en classe, les élèves utilisent un ordinateur relié à un réseau pour effectuer des activités axées autour de projets dont ils assument la responsabilité avec le soutien de leur enseignant ou de leur enseignante et à travers lesquels ils apprennent ensemble et développent progressivement une communauté d'apprenants et d'apprenantes.
Une première section de ce guide rappelle brièvement l'origine et l'évolution de l'approche par projet en éducation. Les quatre autres s'appliquent, d'une part, à présenter cette approche sous divers aspects lorsqu'elle est utilisée avec l'ordinateur en réseau et dans un contexte de collaboration entre apprenants et apprenantes et, de l'autre, à proposer des voies, des balises et des ressources qui sont de nature à favoriser sa mise en oeuvre. Ces sections sont respectivement centrées sur ce qu'a apporté l'expérience de ces dernières années concernant les potentialités et le fonctionnement de cette approche, sur ses fondements, sur une démarche à suivre jugée souhaitable pour en optimiser les résultats et sur une gamme de ressources accessibles par Internet jugées utiles.
Aux États-Unis, les principaux pionniers de l'approche par projet ont été, sur le plan expérimental, John Dewey et, sur le plan théorique, William H. Kilpatrick. Dès le premier quart du 20e siècle, ces deux professeurs et chercheurs ont démontré la fécondité de l'approche par projet et en ont dégagé les principales caractéristiques. En Europe, l'approche par projet, aussi appelée "pédagogie par projet" ou "de projet", a donné lieu à de nombreuses expériences dans plusieurs pays. Le guide attire l'attention sur la pensée et l'action de l'Ukrainien A. S. Makarenko, de Célestin Freinet et du Groupe français d'éducation nouvelle, un groupe toujours actif. Dans les classes, l'approche par projet a presque partout occupé une place relativement limitée, mais elle est toujours demeurée vivante. Elle a aussi exercé une influence significative sur un mouvement pédagogique plus global qui a mis de l'avant une préoccupation pour l'individualité des élèves et l'introduction dans la classe d'activités qui favorisent la recherche, l'exploration, la collaboration avec d'autres et l'expression individuelle et collective. Depuis le développement accéléré de la télématique, dans les années 1990, l'approche par projet semble animée par une vitalité nouvelle, comme le confirment de nombreuses expériences en cours.
Parmi les questions pratiques que soulève une approche par projet où les participants et participantes sont reliés à un réseau informatique, figurent le genre de projets qu'une telle approche rend possible et, plus spécifiquement, les objectifs que ces projets permettent de poursuivre et les apprentissages qu'ils permettent de faire. À partir d'expériences réalisées au cours des dernières années, dont plusieurs avec le soutien du programme Rescol à la source , on peut d'ores et déjà effectuer certains constats. La section II du guide retient les cinq suivants :
Une seconde sous-section de la section II présente, principalement sous forme de tableaux, le genre d'activités (soit individuelles, en petit groupe ou collectives) pertinent à une approche par projet soutenue par des ordinateurs en réseau, les acteurs dont cette approche facilite la collaboration à des fins d'apprentissage et le type d'information et d'interaction entre eux sur lequel elle ouvre et de résultats auxquels elle peut conduire.
La pensée de John Dewey et de Charles S. Peirce, mais aussi de plusieurs auteurs actuels, fournissent à l'approche par projet mise de l'avant dans ce guide de solides fondements. Ceux-ci soulignent l'importance d'une formation à une collaboration avec d'autres personnes tout autant qu'à l'autonomie individuelle et mettent en relief, entre autres, la participation propre de l'élève dans l'acte d'apprendre, la dimension sociale de l'apprentissage et son caractère "négocié", la nécessité d'une démarche où l'apprentissage est "ancré" dans le réel, "situé" dans le contexte où il a pris forme et finalisé par une "intention" et le rôle de guide et de médiateur de l'enseignant ou de l'enseignante. Quelques résultats d'expériences illustrent ce que l'on cherche, ici et là, à accomplir dans ces directions.
Sur le plan opérationnel, une approche par projet avec des ordinateurs en réseau "consiste à préparer, à exécuter et à exploiter pédagogiquement des activités réalisées par des élèves en interaction les uns avec les autres et avec diverses ressources, notamment celles du réseau informatique auquel ils sont reliés". Chacune des phases que suggère cette définition, soit la préparation, l'exécution et l'exploitation d'un projet, comprend deux ou trois activités majeures, qui constituent également des étapes logiques dans son déroulement. Ainsi, la phase préparatoire de la démarche proposée comprend le choix d'un projet, le repérage des ressources requises et l'organisation du travail qu'il implique. La deuxième phase se caractérise par l'élaboration progressive d'une pensée et de documents à l'intérieur des équipes en voie de réaliser un projet et par la coordination et la synthèse des contributions individuelles au sein de ces équipes et des équipes comme telles au niveau de la classe. Enfin, la phase d'exploitation pédagogique a comme pôles d'activité un retour sur l'ensemble du projet et les suites qui lui seront données.
La dernière section du guide fournit
l'adresse électronique de nombreuses ressources accessibles
par ordinateur et précise ce que chacune peut apporter
dans le cadre d'une approche par projet. Ces ressources sont regroupées
sous cinq catégories, soit des mégasites de ressources
"en ligne", que l'on peut assimiler à des répertoires
de ressources d'information; des sites centrés sur des
échanges d'information et d'idées à l'échelle
planétaire, principalement entre élèves;
des sites Web spécialisés dont le but consiste à
favoriser la collaboration entre acteurs dans le cadre de projets
communs; des logiciels-outils de télécollaboration
sur Internet et, enfin, des sites qui se distinguent par leur
préoccupation de promouvoir un soutien et une collaboration
entre enseignants et enseignantes.
On apprend par divers chemins. L'un d'entre eux consiste à mémoriser des faits, des dates, des définitions et d'autres éléments de connaissance. De même, par une étude soutenue et systématique, on peut en arriver à comprendre les contenus essentiels des mathématiques, de l'histoire, de la biologie ou de toute autre discipline. Les conversations courantes, l'observation spontanée de la nature et de la société et la réflexion sur les expériences multiples de la vie quotidienne constituent également des voies d'accès à certaines connaissances. Ce guide porte sur un autre chemin encore pour accéder au savoir, soit l'approche par projet. Dans ce cas, c'est au fil des activités qui contribuent à la réalisation d'un "projet" effectué en collaboration que les personnes en cause acquièrent des connaissances, maîtrisent des habiletés et développent des attitudes qui accroissent leur "savoir". C'est aussi à travers le déroulement même de cette démarche que les participants et les participantes(1) font appel aux ressources de leur mémoire, étudient avec rigueur des événements ou des phénomènes et tirent parti des expériences de leur vie dans le sens évoqué ci-dessus.
En outre, l'approche par projet sur laquelle porte ce guide utilise, à l'intention des élèves de l'enseignement primaire et de l'enseignement secondaire, les médias d'aujourd'hui. Au centre de ces médias, se trouve le micro-ordinateur, dont les pouvoirs dans le domaine de l'information sont constamment multipliés par sa mise en réseau avec des millions d'autres et son couplage avec un nombre sans cesse croissant d'instruments de lecture des sons et des images, de simulation, d'édition, d'impression et de transmission à distance.
Un troisième trait majeur de l'approche par projet proposée dans ce guide est qu'elle a d'abord la classe, et la totalité de la classe, comme base d'opération. Les attitudes et les manières de faire suggérées visent à faciliter une évolution de la classe vers une communauté d'apprenantes et d'apprenants motivés et qui intègrent formation personnelle et découverte du monde. La capacité de cette approche d'enrichir la communication pédagogique au sein de la classe et de conduire tous les élèves qui la composent à un progrès réel dans la croissance et la qualité de leur apprentissage(2) est d'ailleurs ce qui peut en premier lieu et principalement justifier son utilisation.
Le présent guide a comme trame à la fois les questions soulevées et les solutions mises de l'avant par des personnes (enseignants ou enseignantes, chercheurs ou chercheuses, etc.) qui ont été associées de près à la pratique d'une approche par projet. Les points qui ressortent de leurs expériences et de leurs études concernent, entre autres, les caractéristiques et les fondements d'une approche par projet; le genre de projets souhaitables ou, compte tenu des contraintes techniques et autres qui existent dans la plupart des classes, le genre de projets possibles; les moyens à employer pour concilier un repérage documentaire riche de la part des élèves, une sélection appropriée des documents retenus, une réelle collaboration entre eux et un produit final cohérent; la manière de susciter de réelles interactions et complémentarités entre élèves d'une même équipe et les équipes d'une même classe, de même qu'entre cette classe et d'autres classes ou groupes; les éléments essentiels d'une démarche par projet qui mène à un apprentissage vrai ou "authentique" et les phases et activités principales à prévoir, de l'émergence d'un projet aux suites qui lui seront données.
Ce guide étant le premier du genre, il possède nécessairement un caractère expérimental. Il veut aider les enseignants et les enseignantes qui ont déjà fait l'expérience d'une approche par projet, en particulier dans le cadre du programme Rescol à la source, de même que les enseignants et les enseignantes qui se sentent prêts à s'engager dans une telle approche, à aller de l'avant avec plus d'assurance, mais il est aussi à espérer que leurs efforts conduiront à son amélioration et, éventuellement, à la production d'autres instruments de soutien.
La première section de ce guide s'intéresse à l'origine de l'approche par projet, ainsi qu'aux facteurs et à quelques initiatives récentes qui ont contribué à sa redéfinition et à sa diffusion. En s'inspirant de cas concrets, la deuxième section tente de cerner ce qui ressort comme orientations dans les projets qui ont déjà utilisé ou utilisent à des fins éducatives des médias technologiques d'aujourd'hui, essentiellement l'ordinateur en réseau. La troisième section dégage et illustre, à partir de recherches et d'expériences récentes, les concepts et les principes sur lesquels peut s'appuyer une approche par projet telle que décrite dans la section II; du même coup, elle fournit une base de réflexion plus large sur l'approche par projet qui est de nature à affermir les expériences concrètes. La quatrième section suggère à l'enseignant ou à l'enseignante une démarche possible. Enfin, une cinquième section réunit des suggestions sur des stratégies et des ressources jugées particulièrement utiles.
(1) Ce guide mentionne toujours explicitement, au singulier et au pluriel, ses premiers destinataires, soit l'enseignant et l'enseignante, et, dans le cas des autres titres ou fonctions des personnes, cherche à être aussi précis et clair que possible; cependant, il n'a pas paru nécessaire de toujours répéter ces titres ou fonctions au masculin et au féminin, ni de faire tous les accords au féminin.
(2) Pour plus de précisions sur la conception et les caractéristiques d'un tel apprentissage, voir notamment Association américaine de psychologie, 1993 et Réseau scolaire canadien, 1996.
Ces dernières années, l'intérêt que l'on a manifesté dans de nombreuses classes pour une approche par projet a souvent été de pair avec l'apparition dans les mêmes classes de nouveaux médias électroniques, en particulier de médias électroniques interactifs. Tant au Canada qu'aux États-Unis, un enseignement organisé autour de projets, de plus en plus fréquemment avec le concours d'ordinateurs en réseau, est devenu un moyen de motiver les élèves, d'accroître la collaboration entre eux, de renouveler la pédagogie et, avant tout, de donner davantage de sens à l'apprentissage scolaire. S'agit-il d'une simple coïncidence, les facteurs responsables de cette situation étant tout autres? Ou doit-on attribuer aux pouvoirs de la technologie la naissance d'un courant pédagogique? Pour répondre à cette question, un bref retour historique s'avère nécessaire. Voyons ce qu'il nous apprend.
Un constat s'impose : l'idée d'un enseignement organisé à partir de projets qui impliquent des contacts à l'extérieur de l'école, une activité manuelle et une collaboration entre élèves fait depuis des siècles partie du corpus de la pédagogie. Cependant, c'est seulement à la fin du 19e siècle que l'on a commencé à faire de l'apprentissage par projet une composante centrale de l'enseignement dans une école ordinaire et à étudier les conditions nécessaires à son efficacité. L'une des toutes premières expériences réalisées dans ce sens a été mise en oeuvre dans l'école-laboratoire fondée par le philosophe et pédagogue John Dewey (1859-1952) et rattachée à l'Université de Chicago. Rappelons que, à l'intérieur de cette école primaire, les élèves étaient subdivisés en équipes et s'activaient autour de projets concrets. C'est, dans une large mesure, dans le cadre de ces projets qu'ils apprenaient à lire, à écrire, à compter, à être attentif aux autres, à assumer des responsabilités et à effectuer plusieurs autres apprentissages.
Au moins trois des convictions de Dewey justifient cette façon de faire : tous les élèves, pour apprendre, doivent être actifs et produire quelque chose; tous les élèves doivent apprendre à penser ou, ce qui, pour Dewey, revient sensiblement au même, apprendre à résoudre des problèmes; enfin, tous les élèves doivent se préparer à vivre en société et, en conséquence, apprendre à collaborer avec d'autres personnes.
Le principal théoricien d'un enseignement centré sur la réalisation de projets en classe a été le psychologue William H. Kilpatrick (1871-1965). L'article qu'il a publié en 1918, sous le titre général "The Project Method", a eu, dans les milieux de la formation des maîtres aussi bien que dans les écoles, un retentissement considérable. Ce professeur et chercheur au Teachers College de l'Université Columbia a aussi, par la suite, largement contribué à la diffusion de cette "méthode" à travers ses cours, ses conférences et un volume publié en 1925. Pour Kilpatrick, un projet est une activité qui possède un but précis, engage dans sa totalité la personne qui l'accomplit et se déroule dans un environnement social. Dans les explications qu'il en donne, il ressort que l'élément déterminant est l'existence d'un but.
En Europe, plusieurs pédagogues ont aussi oeuvré dans le sens de ce que l'on a appelé une "pédagogie par projet". Tel est le cas, par exemple, pour l'Ukrainien A.S. Makarenko (1888-1939). Il a été instituteur, puis directeur, dans des écoles ordinaires, mais ce sont surtout les principes et les pratiques qu'il a mis de l'avant alors qu'il dirigeait des communautés de travail -communément appelées des "colonies"- qui accueillaient des enfants abandonnés et de jeunes délinquants (et, à l'occasion, de jeunes délinquantes) qui l'ont fait connaître et ont inspiré, dans divers pays, de nombreux enseignants et enseignantes. Parmi ces principes et ces pratiques, figurent, rappelons-le, une confiance quasi illimitée dans les pouvoirs de l'éducation et la capacité d'évolution des jeunes; la nécessaire découverte d'une responsabilité sociale, principalement à travers un travail assumé avec d'autres et pour les autres; la prise de responsabilité, individuelle et collective et la plus étendue possible, tant à l'intérieur d'équipes ayant chacune leurs traits propres que dans le cadre de structures plus larges et le besoin de "perspectives" et de buts. Dans ce contexte, le rôle de l'éducateur ou de l'éducatrice consiste, selon Makarenko, à faire émerger chez les jeunes de nouveaux horizons, sans cesse plus exigeants mais jamais inatteignables, et à les aider à leur donner une forme concrète et à s'en rapprocher.
Le pionnier européen le plus connu de l'apprentissage par projet est Célestin Freinet (1896-1966). L'influence qu'il a exercée sur cet aspect, comme sur bien d'autres, de l'école "moderne" ou "nouvelle" a été et demeure forte. En l'occurrence, il convient de noter que la place qu'il a accordée à l'utilisation en classe d'outils technologiques de son temps concorde remarquablement avec celle que le présent guide propose que l'on fasse à des médias d'aujourd'hui. Dans les "classes Freinet", les élèves disposent de livres et d'autres documents écrits, mais aussi de presses à imprimer, de phonographes, de magnétophones et de divers autres instruments de nature technologique. Ce sont autant les élèves que les enseignants et les enseignantes qui utilisent, selon leurs besoins, ces instruments. Ensemble, ils forment une communauté de travail sans cesse en devenir. La classe est donc d'abord un lieu où tous s'appliquent à un travail, c'est-à-dire un lieu où l'on recherche des informations, où l'on échange des opinions ou des trouvailles, où l'on répond ensemble à une lettre reçue d'une autre classe d'élèves, où l'on prépare des enquêtes en dehors de la classe, où l'on analyse des données et où l'on s'exprime à travers des textes réunis dans un journal, des présentations orales, des représentations théâtrales, des montages sonores ou photographiques, etc. Dans un tel environnement, progressivement enrichi, la collaboration à l'intérieur d'équipes ou sous d'autres formes s'impose d'elle-même. La manière dont on aborde le travail contribue aussi à créer une certaine communauté de vie. L'ambition de Freinet est, en bref, de former un être humain qui possède une tête bien faite, plutôt que bien pleine, des "mains expertes" et la capacité de participer à une activité constructive au sein d'une communauté "qu'il sert et qui le sert".
Parmi les changements multiples et substantiels que le Groupe français d'éducation nouvelle a proposés sur l'école et, dans bien des cas, essayé d'implanter, la pédagogie du projet occupe une place privilégiée. Les éducateurs et les éducatrices membres de ce groupe, toujours vivant, ont expérimenté une approche par projet avec des élèves de tout âge, dans la plupart des matières, autour de thèmes pluridisciplinaires et interdisciplinaires, avec des moyens très variables et dans les contextes scolaires les plus divers.
En général, le Groupe français d'éducation nouvelle met l'accent sur des projets qui ont un lien avec des situations ou des problèmes concrets et de caractère social. Il a posé comme principe que tout projet devait conduire à des transformations dans la vie de l'élève, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur de l'école. Tout projet scolaire doit, en somme, tendre à devenir un projet de vie. Aussi, cette pédagogie se situe-t-elle sans équivoque du côté des tenants d'une construction de son propre savoir et d'une participation au développement du savoir lui-même par l'élève. Comme concentré de sa pensée sur cette dimension à la fois personnelle et sociale du savoir scolaire jugé souhaitable, le Groupe français d'éducation nouvelle a mis de l'avant la notion de "démarche d'auto-socio-construction du savoir". En effectuant cette démarche, l'élève développe un esprit de recherche, d'expérimentation et de collaboration et améliore sa maîtrise de méthodes, de connaissances, d'habiletés intellectuelles et d'attitudes, mais aussi, plus profondément, il acquiert un pouvoir sur la sélection et l'utilisation de l'information et, par voie de conséquence, sur le réel.
2. Une jonction avec un mouvement plus large
L'approche par projet s'appuie donc sur une tradition qui en a déjà éprouvé les fondements et les résultats. En outre, même si cette approche n'est jamais devenue une pratique régulière que dans un nombre restreint de classes, on ne peut pas la considérer comme une orientation pédagogique marginale. En effet, elle a pris racine à l'intérieur d'un mouvement socio-éducatif durable qui, depuis le tout début du 20e siècle, tant en Amérique du Nord qu'en Europe, propose des changements majeurs dans l'enseignement scolaire. Selon les lieux et les moments, ce mouvement a pris, entre autres, les appellations d'école "nouvelle", "moderne", "sans murs", "active" ou "alternative", de "free school", d'"activity movement" ou de "progressive education".
La pierre d'assise de ce mouvement est une attention portée à chaque élève : à son milieu d'origine, à ses acquis, à sa motivation, à ses centres d'intérêt, à ses méthodes de travail, en bref à son individualité. De multiples expériences ont démontré que le respect de cette orientation fondamentale entraînait plusieurs conséquences. L'une d'entre elles est que l'on doit prévoir, à l'intérieur de la classe, de nombreuses activités auxquelles les élèves participent. Et ces activités doivent fournir aux élèves l'occasion d'adopter une attitude de recherche, d'explorer, d'échanger entre eux, de travailler avec leurs mains, de faire quelque chose ensemble et de s'exprimer de diverses manières. Une autre conséquence d'un enseignement centré sur l'élève est qu'il faut, très souvent, revoir les contenus proposés; ceux-ci doivent avoir un sens par rapport à des préoccupations personnelles ou à des réalités naturelles ou sociales que l'élève est lui-même en mesure d'observer ou de faire siennes par quelque autre moyen. De tout ceci, il résulte que l'enseignant ou l'enseignante doit transmettre directement moins d'informations et donner moins de directives, mais devenir plutôt un guide, au double sens de ce terme, à savoir une personne qui connaît et indique des chemins qui conduisent à l'apprentissage souhaité et une personne qui possède la capacité d'en aider une autre à dépasser ses tâtonnements, ses hésitations ou son manque de confiance en elle-même, qui l'"accompagne" en quelque sorte dans son évolution.
Alors que, dans un premier temps, à l'intérieur de ce mouvement global, on mettait l'accent, tel que déjà mentionné, sur les caractéristiques de l'élève et sur une participation plus consciente et plus active de sa part à son apprentissage, on le met maintenant sur les conditions d'un apprentissage réellement maîtrisé et les stratégies requises pour parvenir à cette maîtrise, ainsi que sur la participation de l'élève à l'élaboration même d'un savoir en évolution. Il appert que, au cours du dernier siècle, l'approche par projet a peu à peu intégré un bon nombre des propositions relatives à l'activité en classe du mouvement pour une école "active". Elle est ainsi devenue l'une des principales formes concrètes à travers lesquelles se présente ce mouvement dans les années 1990.
L'approche par projet n'est donc pas une idée neuve, mais, telle qu'elle s'affirme depuis quelques années, elle contient du neuf. En outre, le développement de la télématique (soit la jonction des télécommunications et de l'informatique) élargit à un tel point ses potentialités qu'elle revêt aux yeux de beaucoup les apparences de la nouveauté.
Les expériences qui ont commencé à exploiter ces potentialités sont de plus en plus nombreuses en Amérique du Nord. Le programme Rescol à la source (http://www.rescol.ca/alasource/f/index.asp) avait soutenu environ 300 à la mi-1998; la plupart d'entre elles illustrent ce que l'on peut accomplir avec des moyens très modestes. Il en existe des centaines d'autres plus ou moins semblables, dont certaines qui ont fait l'objet d'une attention particulière. C'est le cas, par exemple, pour le projet CoVis (Learning Through Collaborative Visualization) (http://www.covis.nwu.edu/), un projet qui a été un précurseur dans la collaboration en ligne entre élèves. Un autre exemple est le projet "MOST" (Missouri Supporting Teachers), qui favorise une immersion des élèves dans de véritables communautés scientifiques et leur permet d'apprendre ainsi les rudiments de la culture scientifique, entre autres en utilisant des outils dont les chercheurs eux-mêmes se servent (voir Laffey et al., 1998, p. 79). Certains articles et volumes de la liste des principaux documents consultés contiennent des précisions sur ces expériences, de même que sur d'autres (voir, par exemple, Brown, 1997, Dede, 1998, Pea, 1993 et Riel et Harasim, 1994). En outre, la section V (Des ressources) mentionne plusieurs sources où on trouvera de l'information sur les fondements, les orientations, les stratégies pédagogiques, les résultats et d'autres aspects de maints projets concrets (3).
La section qui suit s'appuie sur ce qui est connu de ces projets et semble commun à une forte proportion d'entre eux, tout au moins au niveau des intentions, pour dégager sommairement en quoi consiste aujourd'hui une approche par projet qui utilise en classe l'ordinateur en réseau. En ce sens, elle complète le portrait de la présente section. Cependant, elle est aussi, en même temps, pour un éducateur ou une éducatrice, une façon de se familiariser avec une approche par projet on ne peut plus contemporaine.
(3) Pour quelques informations et références complémentaires sur l'approche par projet, voir Réginald Grégoire inc. Les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) et l'apprentissage par projet. Notes de travail. .
AVEC LES RÉSEAUX ÉLECTRONIQUES D'AUJOURD'HUI,
QUELS PROJETS?
Certains des réseaux d'ordinateurs qu'évoque le titre de cette section ne desservent qu'un nombre restreint d'utilisateurs et d'utilisatrices et pour des fins particulières; on les appelle des intranets. D'autres, par contre, sont ouverts à toutes les personnes d'un territoire qui veulent s'y relier ou ont, comme c'est le cas pour le réseau Internet, des ramifications dans le monde entier. Les informations que véhiculent ces réseaux peuvent provenir directement des personnes qui entrent en communication -on parle alors de courrier électronique et, dans la même veine, de dialogue à distance, de groupes ou de forums de discussion, de vidéoconférence ou d'autres modes de communication entre personnes- ou avoir été stockées au préalable sur un site Web ou dans quelque banque d'information. Ces ordinateurs, éventuellement pourvus d'imprimantes, de numériseurs ("scanners"), de lecteurs de vidéocassettes ou de cédéroms ou d'autres outils dits périphériques, rendent possible l'accès à des informations sous diverses formes (écrite, graphique, sonore, visuelle, multimédia ou autre).
Ce sont ces réseaux (intranets ou Internet et leurs variantes) que l'on a commencé, depuis quelques années déjà, à utiliser dans le cadre de projets conduits dans des groupes-classes. En quoi consistent ces projets? Pour quelles fins fait-on appel aux réseaux mentionnés ci-dessus? Quels objectifs de formation cherche-t-on à atteindre à travers eux? Avec quelles méthodes et stratégies? Et pour quel genre de résultats? C'est, pour l'essentiel, à partir de ces questions que la présente section s'applique à apporter certaines clarifications sur l'approche par projet qui fait l'objet du présent guide. Elle le fait en deux temps. Dans une première sous-section, elle effectue, en s'inspirant d'expériences récentes ou en cours, cinq constats. Ceux-ci portent respectivement sur :
Dans une deuxième sous-section, trois tableaux, brièvement commentés, dégagent ce qui ressort de ces constats concernant la nature et le fonctionnement général d'une approche pédagogique où les élèves réalisent en collaboration et avec le soutien d'ordinateurs en réseau des projets qui ont un sens pour eux et les conduisent à des apprentissages substantiels et bien maîtrisés.
1. CONSTATS TIRÉS D'EXPÉRIENCES RÉCENTES OU EN COURS
1.1 Dans les projets qui semblent les mieux réussis, les thèmes des projets sont proches de la vie ou des centres d'intérêt des élèves.
Les thèmes à partir desquels les groupes-classes choisissent d'élaborer un projet s'inspirent le plus souvent des trois sources suivantes : une composante ou un aspect particuliers du monde naturel ou animal; des réalités sociales qui préoccupent le milieu d'où proviennent les élèves de ces classes; des phénomènes ou des événements, réels ou fictifs, du présent ou du passé, qui stimulent l'imagination de ces élèves. La forêt et l'ours polaire constituent des exemples de la première source d'inspiration, l'injustice et l'occupation des loisirs de la deuxième et la disparition des dinosaures et la guerre des Gaules de la troisième. Au moment où ils amorcent l'étude d'un thème, la plupart des élèves en ont donc déjà, par l'observation spontanée, l'expérience personnelle ou l'imagination, une certaine "connaissance", si sommaire soit-elle.
Le TABLEAU 1 énumère quelques exemples de thèmes tirés du programme Rescol à la source (http://www.rescol.ca/alasource/f/index.asp). On constate que les thèmes 3, 4, 8, 9, 10 (décrit ci-après, dans la section 1.2) et le premier sous-thème 11 se rattachent au monde naturel ou animal, les thèmes 2 (décrit ci-après), 5, 6 et 7 à des réalités sociales et le thème 1, ainsi que le second sous-thème 11, à des phénomènes ou à des événements qui se situent au-delà de l'ordinaire. La documentation consultée contient de nombreux autres exemples. Ainsi, en relation avec l'environnement naturel et les animaux, un groupe-classe est préoccupé par la qualité de l'eau d'un lac ou d'une rivière proche et un autre par une planète, une plante ou un insecte. En relation avec l'environnement social, on s'interroge sur l'opportunité de construire un nouveau pont dans une ville ou de protéger un bâtiment ancien contre la démolition. Enfin, les élèves de tous les âges trouvent volontiers des thèmes qui les intéressent dans la longue liste des phénomènes qui ont marqué la transformation du monde naturel, du Big Bang à El Niño en passant par l'apparition de la vie ou l'évolution de la vie animale (changements climatiques, cataclysmes, interventions humaines, etc.) et des événements qui ont infléchi le cours de l'histoire (inventions, guerres, action de personnalités marquantes, etc.).
L'encadré intitulé "Une enquête internationale sur les habitudes télévisuelles" résume un projet qui porte sur une réalité sociale à la fois omniprésente et proche des jeunes. À cause des messages qu'elle transmet, la télévision ouvre aussi la voie à de nombreux autres thèmes.
UNE ENQUÊTE INTERNATIONALE SUR LES HABITUDES TÉLÉVISUELLES À l'initiative d'une classe d'Ottawa, des classes d'élèves de 10 à 12 ans d'une douzaine de pays ont uni leurs efforts pour effectuer une enquête sur les habitudes télévisuelles d'environ 4 000 jeunes de leur âge. Dans un premier temps, les élèves de chaque classe ont, durant une semaine, noté le temps pendant lequel ils avaient regardé la télévision et les émissions qu'ils avaient regardées, puis ils ont compilé et analysé les résultats selon qu'il s'agissait des filles, des garçons ou de tous les élèves de la classe. En second lieu, ils ont mis en relief les différences entre les filles et les garçons concernant les émissions les plus regardées. Enfin, tous ont répondu à un questionnaire sur la violence, les modèles et la publicité que l'on retrouve au petit écran. La coordination des opérations a été assurée par courrier électronique. C'est aussi par ce moyen que les résultats de chacune des classes ont été acheminés à la classe d'Ottawa qui avait lancé le projet. Celle-ci a alors procédé à une compilation et à une analyse de l'ensemble des résultats, puis a transmis le portrait global qu'elle en avait tiré à chacune des classes participantes.
Ce constat rejoint le point de vue de chercheurs qui considèrent l'apprentissage par projet comme "une forme d'enseignement en contexte qui met fortement l'accent sur la position et la description de problèmes par l'élève" (Laffey, Tupper, Musser et Wedman, 1998, p. 74) ou qui le présentent en affirmant que, dans une telle approche, "les élèves recherchent des solutions à de vrais problèmes en posant et en raffinant leurs questions, en débattant des idées, en formulant des hypothèses, en préparant des plans et/ou des expériences, en réunissant de l'information, en recueillant et en analysant des données, en tirant des conclusions et en communiquant leurs idées et leurs résultats à d'autres" (Krajcik, Blumenfeld, Marx et Soloway, in ibid. L'italique est de nous).
1.2 L'initiation à une utilisation pédagogique de l'ordinateur en réseau et au travail en collaboration fait partie des objectifs visés. Certains projets en font même un objectif prioritaire.
Il importe de ne pas confondre l'habileté à manier un ordinateur ou un logiciel et l'application de la dextérité acquise dans ces domaines à la recherche, au tri et au classement de données pertinentes. L'aisance d'un bon nombre d'élèves d'aujourd'hui avec les médias électroniques ne signifie pas automatiquement une capacité d'utiliser l'ordinateur avec méthode et efficacité en vue d'apprentissages de plus en plus exigeants, comme ceux que réclame l'école par exemple. De nombreux enseignants et enseignantes qui ont tenté une approche par projet avec la technologie décrite au début de cette section ont constaté que l'initiation des élèves, mais aussi leur propre initiation, à une utilisation pédagogique de cette technologie et au travail en collaboration était nécessaire et qu'elle requérait un temps et une énergie qui pouvaient devenir appréciables. Cette initiation implique, entre autres, une capacité de répartir un travail, d'utiliser un ordinateur à des fins précises d'exploration, d'approfondissement ou de communication, de comparer des données en provenance de sources différentes et d'apprendre les uns des autres.
La prise de conscience de cette situation a incité des éducateurs et des éducatrices à prévoir des projets où, au cours d'une première phase, les objectifs d'apprentissage dans une matière ou sur un thème donné -la langue, la biologie ou les grands fleuves de l'Amérique du Nord- ne dépendent que partiellement de l'emploi qui sera fait de l'ordinateur; dans ces cas, l'objectif prioritaire, quoique habituellement non exclusif, est l'exploitation de l'ordinateur en réseau et de logiciels -ou de didacticiels- comme outils d'apprentissage. Ainsi, dans le projet brièvement décrit ci-après ("Une excursion en montagne ... et sur Internet"), l'accent est mis, non sur l'étude des montagnes Rocheuses, que l'on cherche cependant à mieux connaître, mais sur l'utilisation du courrier électronique et du réseau Internet pour produire à distance un journal. On se donne ainsi des moyens pour partager plus efficacement un savoir avec d'autres au cours d'une autre phase du même projet ou de la réalisation d'un autre projet.
UNE EXCURSION EN MONTAGNE ... ET SUR INTERNET Une quarantaine d'élèves de la 9e à la 12e année de cinq écoles francophones du Manitoba ont, au cours d'une excursion de ski de huit jours dans les montagnes Rocheuses, maintenu le contact avec les camarades de leurs classes et plusieurs autres personnes. Grâce au courrier électronique, ils transmettaient chaque jour à une équipe d'élèves et d'enseignants et d'enseignantes du Manitoba des articles qui faisaient état de leurs activités et de leurs découvertes. Dans les heures qui suivaient, ces articles étaient publiés sur un site Web accessible à toutes les personnes qui en possédaient l'adresse. Celles-ci pouvaient aussi y aller de leurs commentaires et de leurs questions.
Ce projet a notamment démontré aux élèves l'intérêt du courrier électronique et du réseau Internet et initié à leur utilisation. Il leur a aussi permis d'effectuer des apprentissages en histoire, en géographie, en rédaction et sur les exigences du travail en équipe.
1.3 Sous la direction de l'enseignant ou de l'enseignante, tantôt très souple et tantôt plus ferme, le thème initial devient le tremplin d'apprentissages de plus en plus poussés et qui touchent toujours plus profondément la relation de l'élève avec le savoir.
L'intérêt initial des élèves pour un thème est essentiel, mais, dans les expériences éducatives réussies, il est perçu comme un premier pas seulement. Sous la direction de l'enseignant ou de l'enseignante, le groupe-classe décortique et discute les principaux éléments du thème, en élargit ou, selon les cas, en restreint le champ et en précise la portée. C'est ainsi que, de fil en aiguille, le thème se mue en projet et l'intérêt spontané en un engagement dans un cheminement de recherche.
De multiples expériences révèlent que, si le projet mis au point a une certaine ampleur, l'élève apprend à situer les questions qu'il se pose dans une perspective plus juste et découvre que, pour y répondre, il doit devenir lui-même capable d'observer, de décrire, de nommer, de comparer, de classer, de synthétiser, d'évaluer et d'effectuer diverses autres opérations intellectuelles. Au fur et à mesure que, de projet en projet, il relève de nouveaux défis, il découvre également que les habiletés requises sont de plus en plus complexes. C'est ainsi que, peu à peu, il s'initie, par exemple, aux exigences de la méthode scientifique, du raisonnement logique et de la collaboration avec d'autres élèves.
Les thèmes qui possèdent un bon potentiel d'exploitation à des fins pédagogiques exercent une influence sur la formation intellectuelle de l'élève et sur ses attitudes face à l'apprentissage, mais aussi sur la conception qu'il se fait du savoir lui-même. Dans une classe où l'on pratique l'apprentissage par projet en utilisant l'ordinateur en réseau, chaque thème prend un sens par rapport à d'autres thèmes. La connaissance est perçue comme une réalité dynamique. En conséquence, la pluridisciplinarité et l'interdisciplinarité vont de soi; le cheminement même d'une recherche sur une réalité sociale telle que la télévision commande l'apprentissage d'un certain vocabulaire, de formules mathématiques et de notions de géographie (voir ci-dessus, dans la section 1.1, "Une enquête internationale sur les habiletés télévisuelles"). De même, pour bien saisir l'importance de la découverte des microbes, de l'atome, des lois de la thermodynamique et d'un grand nombre d'autres découvertes scientifiques, des connaissances historiques sont essentielles. Parce que l'utilisation des plus récentes technologies permet d'avoir accès à des données à jour sur des problèmes très concrets aussi bien que sur des recherches théoriques et sur des événements d'aujourd'hui aussi bien que sur un patrimoine millénaire, elle contribue à rendre encore plus évident pour l'élève le caractère vivant et sans cesse en transformation du savoir.
1.4 L'approche par projet favorise l'emploi de méthodes de travail et de stratégies pédagogiques multiples.
L'idée d'une approche par projet en classe suggère d'elle-même celle d'une collaboration entre plusieurs personnes. C'est encore plus clairement le cas dans une approche par projet qui, comme dans ce guide, cherche à utiliser au mieux plusieurs ordinateurs reliés entre eux. Les projets alors retenus impliquent nécessairement que, à un moment ou l'autre, au cours de l'exploration des thèmes de ces projets ou de l'exploitation des résultats obtenus, il y ait partage entre les élèves de tâches à effectuer et que ceux-ci soient amenés à communiquer avec d'autres personnes et divers organismes, à coordonner de nombreuses opérations et à mettre en commun, à maintes reprises, des résultats partiels.
Même si c'est une équipe d'élèves (qui peut se confondre avec un groupe-classe) qui assume la responsabilité d'un projet et si c'est à ce niveau que les résultats les plus visibles sont attendus, le travail individuel de chacun des membres de l'équipe demeure vital. Chacun d'eux, en effet, est appelé à repérer de l'information, à juger de sa valeur et à l'ordonner, à écrire et à calculer, à faire des plans, des expériences ou un montage visuel ou à effectuer maintes autres activités. Certains projets ont également assez d'ampleur pour que des élèves ou une équipe d'élèves puissent y greffer des objectifs particuliers d'apprentissage ou même y rattacher l'un ou l'autre projet plus spécifique (voir Desbiens, 1998).
Le projet nord-américain des écoles où on apprend à penser ("Schools for Thought") est soutenu par trois équipes qui ont mis en commun pour le réaliser les résultats de leurs recherches et de leurs expériences dans des écoles (voir, entre autres, Williams et al., 1998).
L'une de ces équipes, qui est ontarienne, est à l'origine d'un mode d'utilisation d'ordinateurs en réseau connu sous le nom de Computer Supported Intentional Learning Environment (CSILE). Dans ce cadre, les élèves sont placés en situation de recherche et de collaboration et, de diverses manières, dont à travers un dialogue continu entre eux à l'aide de "notes", s'approprient des connaissances en même temps qu'ils participent activement à leur élaboration.
Une seconde équipe, le Cognition and Technology Group, est rattachée à l'Université Vanderbilt, au Tennessee. À l'intérieur de plusieurs projets, ses membres mettent l'accent sur la résolution en équipe de problèmes réels ou qui pourraient se poser. On cherche plus particulièrement à promouvoir un apprentissage "authentique", "ancré" ("Anchored Instruction").
Enfin, une troisième équipe, dont les principaux animateurs sont les psychologues Ann Brown et Joseph Campione, a surtout concentré ses efforts sur le développement de communautés d'apprenants et d'apprenantes ("Fostering Communities of Learners").
L'approche par projet avec ordinateurs en réseau crée un contexte qui favorise à la fois et de façon complémentaire le travail en équipe et le travail individuel, mais aussi l'emploi, dans un cas comme dans l'autre, de multiples méthodes de travail et stratégies pédagogiques. Tout naturellement -ce qui ne signifie pas automatiquement- , les élèves sont invités à soulever des questions, mais aussi à trouver des réponses; à s'exprimer par écrit, mais aussi oralement et visuellement; à effectuer des travaux d'analyse, mais aussi de synthèse; à développer des habiletés intellectuelles, mais aussi sociales et, entre autres encore, à utiliser des stratégies cognitives, mais aussi métacognitives. Ces dernières années, plusieurs projets ayant une orientation proche de celle dont il est question dans ce guide (voir, par exemple, ci-dessus, l'encadré intitulé "Des écoles où on apprend à penser") ont démontré une grande capacité à intégrer des préoccupations méthodologiques et pédagogiques très diversifiées et, par voie de conséquence, à tenir compte de l'âge, de la motivation et des principales autres caractéristiques des élèves qui exercent une influence sur leur apprentissage.
Dans cette entreprise commune, les moyens technologiques les plus récents servent à stimuler, à partir de projets variés, la création de communautés d'apprenants et d'apprenantes qui puisent aux meilleures sources pour répondre à des questions qui ont un sens pour les élèves. On utilise cependant aussi toujours des moyens plus traditionnels, comme le crayon, le cahier et le livre. Tout en retenant certains éléments de l'école traditionnelle, on cherche à en ajouter d'autres qui élargissent et renouvellent la gamme des méthodes et des stratégies auxquelles l'enseignant ou l'enseignante peut faire appel.
1.5 Le résultat final du projet est cohérent avec la démarche suivie, a un caractère collectif et démontre de manière probante la maîtrise qui a été atteinte par rapport aux objectifs d'apprentissage prévus.
Dans une approche par projet, les processus qui consistent à "faire" quelque chose et à "apprendre" quelque chose sont inextricablement liés (voir Blumenfeld et al., 1991, p. 372). C'est en cherchant la réponse à une question ou à un problème d'une certaine importance que les élèves découvrent des lois, des dates et mille autres données, font des connexions entre elles et apprennent à utiliser autrement leur intelligence et leurs mains. Il est donc logique que ce soit ce qui a été "fait" ou, en d'autres mots, le "produit" qui en a été la résultante qui serve à évaluer ce qui a été appris. Concrètement, ce produit, c'est un texte, un objet, un montage sonore, un comportement dans une situation déterminée, une présentation devant la classe ou un autre groupe ou tout autre "ouvrage" qui rend compte d'une démarche d'apprentissage qui a été effectuée en collaboration. Quant aux critères permettant d'évaluer l'étendue, la profondeur ou toute autre caractéristique de la maîtrise atteinte, ce sont les apprentissages prévus dans le curriculum de l'école ou de plusieurs écoles qui relèvent d'une même autorité; toutefois, dans une approche par projet avec des ordinateurs en réseau, ces apprentissages ont habituellement été reformulés en termes plus interdisciplinaires, ou même transdisciplinaires, autour, par exemple, de concepts majeurs, de thèmes ou d'interrogations qui demandent recherche et réflexion.
Si le produit a un caractère collectif, c'est d'abord parce que la question qui était à son origine requérait un travail en collaboration ou, tout au moins, parce que l'on pouvait y répondre plus adéquatement en procédant ainsi. Le produit n'est donc pas seulement un assemblage de travaux individuels; il intègre l'apport de chacun et de chacune, mais le dépasse aussi dans une synthèse discutée et validée en tant que telle.
Les thèmes des projets, l'initiation à une utilisation pédagogique de l'ordinateur en réseau et au travail en collaboration, l'approfondissement du thème par chacun des élèves sous la direction à la fois souple et ferme de l'enseignant ou de l'enseignante, l'emploi de méthodes de travail et de stratégies pédagogiques multiples et les caractéristiques du résultat final sont autant d'aspects à considérer d'une façon toute particulière lors de l'élaboration et de la réalisation de projets d'apprentissage. Peut-être convient-il, en conclusion, de revenir plus spécialement sur l'attention à accorder aux élèves. Vu sous cet angle, un bon projet doit notamment avoir un effet motivant pour eux et les conduire à des apprentissages significatifs. Dans un article substantiel consacré aux interactions entre la motivation et l'apprentissage dans une approche par projet, une équipe de chercheurs de l'Université du Michigan décrit ainsi, en s'appuyant sur un texte de T.W. Malone et M.R. Lepper publié en 1987, ce qui est de nature à motiver les élèves : "L'intérêt des élèves et la valeur qu'ils accordent à un projet augmentent lorsque les tâches sont variées et incluent des éléments de nouveauté; le problème abordé est réel et important; la solution de ce problème constitue un défi; le projet aboutit à une production ou à quelque autre résultat final; les élèves ont des choix quant au travail qui sera fait et à la manière dont il le sera et, enfin, lorsque les élèves ont l'occasion de travailler avec d'autres personnes" (Blumenfeld et al., 1991, p. 375).
2. NATURE ET FONCTIONNEMENT DE L'APPROCHE PROPOSÉE: APERÇU SYNTHÉTIQUE
Le TABLEAU 2 présente, autour de quelques constituants majeurs, une vue d'ensemble de la nature et du fonctionnement d'une approche par projet soutenue par des ordinateurs en réseau (intranets ou Internet). Il fait ressortir les points suivants :
Que l'activité effectuée dans le cadre d'un projet d'apprentissage soutenu par des ordinateurs en réseau soit le fait d'une personne (élève ou éducateur), d'un petit groupe ou d'une collectivité plus large, l'une de ses caractéristiques majeures est d'être relationnelle. Cette relation peut, dans tous les cas, être établie avec une autre personne, un autre petit groupe, une autre classe ou n'importe quel site Web de la planète. C'est ce qu'explicite le TABLEAU 3.
Enfin, le TABLEAU 4 vise à concrétiser le contenu des tableaux 2 et 3. Pour chacune des catégories d'opérations (L'information et les interactions entre personnes) et chaque genre d'activités (individuelles, en petit groupe ou collectives, chacune d'entre elles pouvant avoir comme acteurs des personnes, de petits groupes, des classes et d'autres acteurs divers reliés au même réseau), il fournit une illustration d'activité et de résultat possible. Cet exercice, que chaque lecteur ou lectrice est invité à poursuivre, permet de constater que les possibilités sont particulièrement nombreuses si on fait appel à tout ce qui est disponible comme outils de travail (logiciels de traitement de texte, d'édition, de recherche, de calcul, de planification, de courrier électronique, de dialogue, etc.) et voies d'accès à des contenus pertinents (banque de données, sites historiques, scientifiques ou autres, travaux en cours dans d'autres classes, forums de discussion, experts, etc.). Il est à noter que, dans ce tableau, chaque illustration est indépendante de toutes les autres. Cependant, on peut fort bien utiliser ce tableau comme une grille permettant d'établir des liens entre l'une ou l'autre activité concrète, de même qu'entre ces activités et les résultats attendus.
On l'a vu dans la section I : l'approche par projet est une idée au moins centenaire. Depuis le tournant du 19e siècle, elle a évolué dans diverses directions et emprunté des formes variées selon les moments et les contextes culturels. Depuis une douzaine d'années, elle subit une réévaluation majeure. Les principaux éléments de cette réévaluation sont l'évolution de la réflexion sur l'apprentissage et, en relation étroite avec cette réflexion, la disponibilité de nouveaux moyens, en particulier l'ordinateur en réseau. Les divisions de cette section s'inspirent de ces deux ferments de transformation : la première attire l'attention sur quelques appuis conceptuels et leurs implications et la seconde sur des expériences effectuées dans le sillage de ces appuis avec des ordinateurs en réseau.
Depuis le début du siècle, la pensée pragmatique de Dewey, mais aussi celle de Charles S. Peirce, servent de fondements aux conceptions expérimentalistes qui affirment que toute personne, jeune ou adulte, apprend en observant les conséquences de ses actions ou à travers ses relations ou "transactions" avec son environnement. Toutefois, étant donné le manque d'autonomie des élèves, la rareté des ressources disponibles en classe et la formation limitée que requérait jusqu'à il y a peu une insertion réussie dans le monde du travail et dans la société en général, les tentatives d'application en milieu scolaire de ces conceptions ont eu comme résultats des situations éducatives à la fois difficiles à maintenir et jugées trop exigeantes.
Avec les médias électroniques de l'an 2000, une approche par projet devient davantage possible. Ce que cette approche apporte s'avère aussi plus pertinent, voire nécessaire, socialement. En effet, l'évolution actuelle des réalités politiques, économiques, culturelles et autres, leurs interrelations à la dimension du globe et l'émergence d'une société du savoir sont autant de phénomènes qui réclament une population non seulement plus instruite, intellectuellement plus autonome et plus capable de créativité, mais aussi, dans la vie sociale en général comme dans le monde du travail, mieux préparée à collaborer avec d'autres personnes. Parmi les voies que doit désormais emprunter l'éducation, il y a, selon la Commission internationale sur l'éducation pour le vingt et unième siècle, créée par l'Unesco, "la découverte progressive de l'autre" à un premier niveau et, à un second niveau, "tout au long de la vie, l'engagement dans des projets communs" (1996, p. 100). Dans les décennies où, dans le monde du travail, on avait surtout besoin d'une main-d'oeuvre obéissante et préparée à l'effort individuel, le behaviorisme d'Edward L. Thorndike et des adeptes de cette théorie a inspiré la réponse du monde de l'éducation. Aujourd'hui, c'est plutôt l'approche éducative avancée par Dewey qui gagne en pertinence; en conséquence, l'approche par projet, dont il a été l'un des principaux pionniers, est vue comme une voie susceptible de permettre à un plus grand nombre d'élèves de développer leurs potentialités et d'assumer de façon adéquate leurs rôles (de citoyen ou de citoyenne, de travailleur ou de travailleuse, de membre d'une famille, d'apprenant ou d'apprenante, etc.) dans la société en devenir.
Cet accroissement considérable des exigences attire l'attention sur l'importance que revêt la motivation à apprendre. Aujourd'hui, de nombreuses études démontrent que le fait de placer les élèves en situation de découvrir le monde et de partager les résultats de leurs démarches d'exploration, d'enquête ou de résolution de problèmes, comme le propose l'approche par projet, constitue l'une des meilleures façons de susciter et de maintenir cette motivation.
Les résultats de leurs démarches empiriques fournissent aussi aux élèves une matière pour réfléchir. C'est à travers cette réflexion que leurs découvertes et, peu à peu, le monde lui-même acquièrent une signification. Conformément à une maxime pédagogique bien connue, c'est dans l'action que se produit l'apprentissage ("Learning by doing"). L'ordinateur branché en réseau fournit à l'enseignant ou à l'enseignante un nouveau moyen pour inciter ses élèves à expérimenter et à observer par eux-mêmes les résultats de leur activité. Paradoxalement, les moyens utilisés pour faire passer les élèves d'une situation d'écoute à une situation où ils participent activement à la découverte du réel (recherche sur le Web, simulations, utilisation de logiciels de collaboration, etc.) relèvent souvent du monde dit virtuel.
Apprendre, c'est penser, rappelait récemment John Abbott (1998) à plusieurs centaines d'administratrices et d'administrateurs scolaires réunis à Québec pour discuter plus spécifiquement de l'intégration des nouvelles technologies en éducation. Dix ans plus tôt, des chercheurs et des chercheuses en sciences cognitives (Lave, 1988; Brown, Collins et Duguid, 1989) démontraient de manière convaincante que l'acte d'apprendre est une interprétation d'une expérience, d'un langage ou d'un phénomène saisi dans leur contexte ("in context"). Par la suite, les sciences cognitives, déjà associées à l'ordinateur depuis trois ou quatre décennies, devaient fournir des assises conceptuelles de plus en plus fortes aux approches qui lient expérience et apprentissage et donnent aux élèves un rôle plus actif en classe, en leur proposant entre autres des situations d'apprentissage qui exigent un engagement cognitif et métacognitif, de même qu'un travail en collaboration. En fait, affirment Ward et Tiessen, l'apprentissage par projet réalisé en collaboration est "une approche de l'enseignement qui vise à engager les élèves dans une démarche voulue de leurs propres objectifs d'apprentissage et dans des interactions sociales ayant comme but une plus grande compréhension de quelque chose" (1997b, p. 299).
Pour que l'approche par projet favorise la maîtrise d'apprentissages complexes, l'application des notions et principes suivants en regard de l'un ou l'autre des éléments fondamentaux de toute situation éducative est suggérée :
L'élève
Les interactions qui se produisent au sein de la situation éducative permettent aux élèves d'être au centre de l'activité d'apprentissage en cours de réalisation et, entre autres, de commencer et de clore des "conversations" en rapport avec des objectifs d'apprentissage connus à l'avance (voir Scardamalia et Bereiter, 1989, sur la notion d'"intentional learning"). La capacité d'interprétation dont sont dotés les élèves, individuellement et collectivement, est mise en évidence par Jerome Bruner qui, dans la foulée de Jean Piaget, insiste sur cette caractéristique de l'apprenant et de l'apprenante. Les concepts et notions qui renvoient à des représentations sociales et culturelles reconnaissables par l'élève lui sont plus facilement accessibles. Autrement dit, l'acte de comprendre n'est plus tant un processus qui conduit à connaître les entités et les attributs qui existent dans le monde qu'"un processus réussi de négociation avec d'autres du sens de ces objets" (Hewitt et Scardamalia, 1998, p. 77). L'élève est appelé à remplir différents rôles au sein de la classe, tous en lien avec des objectifs d'apprentissage. Il est souhaitable que les rôles qu'il assume sollicitent de sa part une participation de plus en plus centrale en regard des apprentissages poursuivis (voir Lave et Wenger, 1991; Brown, Collins et Duguid, 1989). Dans un projet d'apprentissage, l'élève participera au processus de gestion du projet dans son ensemble, et non seulement d'une partie.
La matière
Habituellement, l'enseignant ou l'enseignante présente la matière à apprendre à travers une série de tâches ou d'activités. Dans une approche par projet, chacun des élèves et la classe dans son ensemble font leurs les objectifs d'apprentissage à atteindre; l'apprentissage est considéré comme une démarche consciente, voulue, animée par une "intention" (voir Bereiter et Scardamalia, 1989). En outre, selon les chercheurs Resnick (1987) et Brown, Collins et Duguid (1989), des activités d'apprentissage structurées à partir de situations de la vie quotidienne ont davantage d'intérêt pour les élèves que celles qui prévalent dans la plupart des classes. Avec l'aide de l'enseignant ou de l'enseignante, les élèves affrontent alors des problèmes réels. Pour sa part, l'enseignant ou l'enseignante échafaude son intervention en prévoyant des activités qui, tout en étant adaptées à la capacité des élèves, proposent des difficultés croissantes.
Les interactions des élèves avec un contenu donné doivent inclure des temps d'exploration, mais aussi de négociation à partir de la représentation qu'ils se font de ce contenu et de concertation sur le degré d'accord qu'ils partagent en commun et l'action qui en découle. L'objectif est d'en arriver à un apprentissage assumé, "ancré" (voir Bransford, 1990). Les contenus plus complexes peuvent être étudiés selon des perspectives multiples, les retours en arrière alternant avec des bonds en avant.
L'enseignant ou l'enseignante
Sa responsabilité est centrale. Le fait que, par exemple, l'élève ait facilement accès à de l'information sur le Web ne peut, à lui seul, conduire à la compréhension jugée nécessaire. La médiation de l'enseignant ou de l'enseignante est cruciale. Depuis une vingtaine d'années, de nombreux chercheurs et chercheuses en sciences cognitives, qui puisent à l'oeuvre du psychologue russe Lev S. Vygotsky (produite dans les années 1920 et au début des années 1930), en ont démontré l'importance. Les ordinateurs branchés en réseau donnent un accès direct à une information et à des possibilités d'interaction situées en dehors de la classe, mais la responsabilité de l'apprentissage des élèves n'en revient pas moins, d'abord et avant tout, à l'enseignant ou à l'enseignante.
Sa responsabilité en est une de guide au sein d'une communauté d'apprenants et d'apprenantes; il lui revient en particulier de faciliter, en veillant à leur orchestration, les démarches des élèves (voir Brown et Campione, 1994 et 1996 et Cognition and Technology Group at Vanderbilt, 1994: Lemière, 1997). Ainsi, dans une communauté d'apprenants et d'apprenantes, les élèves assument des rôles sociaux complémentaires et apprennent, par exemple, à réguler leur propre performance ou comportement tout en régulant ceux des autres. La médiation attendue de l'enseignant ou de l'enseignante est, dans la ligne de la pensée de Vygotsky, double : métacognitive et cognitive. Par une médiation axée sur la métacognition, l'enseignant ou l'enseignante conduit l'élève à prendre progressivement en charge son apprentissage (soit, à le planifier, à l'orienter, à le réguler, à le vérifier et à l'évaluer). Ainsi, au fur et à mesure que l'élève devient plus compétent, l'enseignant ou l'enseignante lui transfère des responsabilités (voir aussi Feuerstein et Rand, 1974). Quant à la médiation cognitive, elle met l'accent sur la maîtrise de connaissances "déclaratives " (i.e. des faits, des données, en bref ce qui est) et "procédurales" (i.e. comment faire ceci ou cela pour parvenir à telle fin), le premier type de connaissances devant être relié au second si l'on souhaite, chez l'élève, un réel développement des habiletés de raisonnement et une capacité d'appliquer de manière flexible les notions apprises (voir aussi Davydov, 1993, trad. Kerr, 1995). Ce n'est pas tant en écoutant parler leur enseignant ou leur enseignante des méthodes de l'analyse scientifique qu'en utilisant eux-mêmes ces méthodes (que l'on peut considérer comme des outils de médiation cognitive) que les élèves apprendront à les maîtriser et à les faire leurs (voir Karpov et Haywood, 1998).
Le contexte
La perspective proposée ici pour considération est celle de l'apprentissage "situé" (voir Lave, 1988 et 1991). Selon cette perspective, qui a pour fondement la théorie de Vygotsky, l'apprentissage de nouvelles connaissances est indissociable du contexte au sein duquel il prend forme. Puisque la plupart des gens pensent que les représentations mentales de l'élève sont internes (voir Anderson, Reder et Simon, 1996), que la connaissance existe dans la tête de chaque individu ("container model"), la suggestion à l'effet que la cognition soit le résultat de la rencontre des personnes, des objets et des situations (Hewitt et Scardamalia, 1998, p. 78 et 80) est quelque peu surprenante. Les chercheurs qui conçoivent l'apprentissage comme situé s'expliquent ainsi : les connaissances, situées dans des contextes réels, existent à travers les façons dont les membres d'une classe (élèves et enseignant ou enseignante) communiquent entre eux, discutent de leurs interprétations et règlent leurs processus et leurs comportements, de même qu'à travers les stratégies permises et les outils et ressources utilisés dans la classe. Ainsi, les contours d'un projet d'apprentissage ayant pris forme dans un contexte donné, ils pourront être élargis par l'usage de l'ordinateur branché en réseau, c'est-à-dire connecté à la communauté locale et au monde.
L'approche par projet crée un contexte, physique et social, à partir duquel l'élève va créer sa représentation d'un concept, d'une notion ou d'un principe donné. D'où l'importance de fournir à l'élève un contexte d'apprentissage et de lui présenter des problèmes à résoudre aussi réels ou authentiques que possible, tout en tenant compte de ses connaissances antérieures.
Toutefois, l'enrichissement du contexte d'apprentissage au moyen de l'ordinateur requiert la vigilance constante de l'enseignant ou de l'enseignante concernant les personnes et les autres ressources accessibles par l'intermédiaire du réseau électronique. L'enseignant ou l'enseignante a la responsabilité "de filtrer ce qui entre dans la classe, afin d'offrir aux élèves des expériences fondamentales et concrètes qui les interpellent et auxquelles ils pourront donner du sens, puis utiliser afin de comprendre des réalités et des matières de plus en plus complexes" (Pepi et Scheurman, 1996, p. 234). Ces auteurs appuient leur mise en garde sur les propos suivants de Dewey : "La première fonction de l'école en tant qu'institution sociale, c'est de fournir un environnement simplifié" (1966, p. 20). Pour ce faire, ce grand penseur, loin de s'en remettre à la pédagogie "frontale", soit celle où l'accent est et demeure placé sur la transmission de connaissances en situation d'écoute, a favorisé, tel que vu dans la section I, l'apprentissage par l'action.
Cette section présente très succinctement des exemples de la façon dont on aborde l'apprentissage dans une approche par projet où on utilise l'ordinateur branché en réseau et des logiciels-outils qui favorisent la collaboration entre élèves. Les résultats obtenus sont aussi, lorsque disponibles, brièvement résumés.
a) Le projet expérimental "Thinker Tools"
Ce projet a débuté en 1986. Il est axé sur l'enseignement des sciences dans les premières années du secondaire et, plus spécialement, sur les théories de Newton. Dans le cadre de ce projet, "la classe devient une communauté de recherche et les élèves proposent et testent des conceptions alternatives à l'aide de modèles sous support informatique. Ils comparent leurs résultats et discutent des théories offrant les explications les plus plausibles. L'apport de ce projet à l'apprentissage des élèves est visible tant en ce qui regarde les principes de physique que la démarche de recherche (inquiry)" (Rapporté par Perkins et Grotzer, 1997, p. 1129; voir aussi White et Frederiksen, 1995).
b) Des projets en matière de sciences et d'éducation à l'environnement
Vers la fin des années 1980, divers projets ont intégré la communication assistée par ordinateur en réseau en vue d'améliorer l'apprentissage, et ce par l'intermédiaire d'actions directes posées en matière de responsabilité environnementale, d'échange de données réelles entre classes, de collaboration entre des classes et des équipes universitaires afin de résoudre certains problèmes et d'une diffusion élargie des résultats obtenus. Ainsi, en Australie, au cours d'un projet sur la qualité de l'eau, une école a découvert la présence d'une substance dangereuse. L'information a été transmise aux responsables locaux, qui ont pris action (voir Robottom et Hart, 1990). Par ailleurs, 16 écoles ont participé au Rouge River Project (voir Wals, Monroe et Stapp, 1990). Le projet canadien sur le Grand Watershed s'en est inspiré (voir McMahen et Dawson, 1995).
Waugh et Levin (1988) ont passé en revue divers projets où les élèves étudient une question de la même manière que les chercheurs et les chercheuses le font. Leur propre projet, appelé Noon Observation, a rejoint des élèves à travers le monde; il consistait à mesurer la circonférence de la terre à partir de la mesure de l'ombre effectuée à midi, heure solaire, un jour précis dans différents lieux (voir McMahen et Dawson, 1995).
c) Au Michigan, en sciences
Lorsqu'un projet met l'accent sur la solution de problèmes réels, "les élèves acquièrent et appliquent des concepts et des principes; ils formulent des plans, documentent leur parcours, évaluent les solutions trouvées et produisent des "artefacts"(4) en lien avec le problème étudié", soulignent Krajcik, Blumenfeld, Marx et Soloway (1994, p. 483-484). Ces chercheurs en sciences cognitives travaillent avec des enseignants et des enseignantes de l'État du Michigan à mettre en application, dans les premières années du secondaire, une approche par projet en sciences. Lorsqu'ils sont bien orchestrés, les projets mis en oeuvre avec l'utilisation de l'ordinateur branché en réseau "incitent les élèves à construire leurs connaissances de manière active, à penser de manière critique et à prendre plus de responsabilité dans leur apprentissage" (id., p. 486).
d) Un portfolio électronique progressif
Dans un État voisin, l'Illinois, Louis M. Gomez et son équipe de recherche ont mis à l'essai un portfolio électronique progressif. Cet outil avait pour but de faciliter la réalisation d'activités d'exploration-réflexion par des élèves du secondaire. Ainsi, un groupe d'élèves ont fait des recherches sur l'orbite autour du Soleil de la planète Pluton en utilisant ce portfolio pour indiquer le cheminement de leur travail et inscrire, puis organiser, les données recueillies. Pour la présentation de leurs résultats, ces élèves ont utilisé des logiciels tels que Hyper Studio ou Claris Home Page (voir Loh et al., 1997, p. 174-175). À l'aide du portfolio progressif, les élèves ont aussi effectué des retours sur leur activité (voir id., p. 176). Les chercheurs concluent leur texte en soulignant que cet outil a encouragé les élèves à chercher de manière réfléchie tout en rendant plus concrets certains aspects méthodologiques de leurs démarches d'exploration.
e) "Une classe branchée: tout un projet"
(http://www.tact.fse.ulaval.ca/fr/html/sites/ces_99/) est une réalisation d'étudiant-e-s de l'Université Laval au B.E.S. Ils ont fait une présentation au Colloque des Enseignants du Secondaire. Ils y relatent leurs expériences acquises au sein d'un stage quant à la pédagogie par projet et l'implication d'une classe en réseau dans le programme PROTIC (http://www.protic.net). Ce programme met l'accent sur le travail scolaire à l'aide d'ordinateurs portatifs (un par élève).
f) Les vingt-deux écoles francophones qui ont participé au projet intitulé "L'eau" (http://www.ac-toulouse.fr/piquecos/pages/eau.html) ont produit ensemble un cédérom sélectionné en 1997 par le ministère de l'Éducation nationale de France pour un concours européen sur le multimédia éducatif. Un deuxième projet du même genre est en route; il porte sur l'éco-citoyenneté.
g) Le réseau "I*earn" (International Education and Resource Network. Voir: http://www.iearn.org/)
En 1995, ce réseau comprenait environ 1 000 écoles, réparties sur tous les continents (voir Copen, 1995). Son but consiste à promouvoir chez les élèves, du préscolaire à la fin du secondaire, une meilleure compréhension de la culture des autres peuples et des problèmes du monde et à les préparer ainsi à relever les défis qu'ils auront à affronter comme adultes. Il exerce son action à travers des projets que les élèves préparent avec leur enseignant ou leur enseignante. En fait, les élèves participent activement à toutes les phases de réalisation des projets. L'enseignant ou l'enseignante est davantage considéré comme un "facilitateur".
La plupart des projets sont centrés sur des problèmes sociaux ou environnementaux réels, mais il en existe aussi sur d'autres thèmes. L'information et le dialogue par courrier électronique tiennent beaucoup de place, mais, habituellement, les projets semblent avoir un objectif final plus précis (un journal international, une comparaison de données sur un phénomène scientifique, un échange de travaux artistiques ou même une aide financière pour la construction de pompes à eau dans des villages du Nicaragua).
Ces projets s'insèrent dans le cours régulier des activités de la classe. Divers témoignages indiquent qu'ils enrichissent le contenu des matières scolaires et ont un effet positif sur la motivation des élèves. On pourrait ajouter aussi qu'ils fournissent un contexte très favorable à une sensibilisation à une langue étrangère.
De tels projets démontrent que, grâce à l'ordinateur branché en réseau, une classe est en mesure de réaliser des projets d'apprentissage où l'élève est actif et participe à l'élaboration de connaissances, fait des liens entre le contenu des matières scolaires et des situations réelles et a accès à une documentation variée et à jour et où l'enseignant ou l'enseignante agit comme un guide ou un "accompagnateur". Sans l'ordinateur en réseau, plusieurs de ces projets ne seraient même pas concevables.
Ces projets sont plus nombreux en milieu anglophone que francophone et ont plus souvent comme pivot les langues et les mathématiques que les autres matières scolaires. Toutefois, de nouveaux projets naissent au fur et à mesure que les écoles et les classes se branchent sur des réseaux.
Les enseignants et les enseignantes désireux d'élaborer des projets avec leurs élèves trouveront respectivement dans les deux sections suivantes une démarche et des suggestions de ressources.
(4) Le terme "artefact", souvent employé en ce moment dans le courant nord-américan sur l'apprentissage par projet, renvoie à toute expression d'un apprentissage cognitif de la part des élèves qui se présente sous une forme tangible et qui est susceptible de faire l'objet d'opinions variées. Son sens est proche du terme "produit" ou, selon le cas, "production" (voir, par exemple, Blumenfeld et al., 1991, p.370, note 1).
En s'inspirant d'expériences réalisées à ce jour, cette section présente et décrit dans ses grandes phases et leurs principales composantes une démarche générale d'approche par projet soutenue par des ordinateurs en réseau. Vue du côté de l'enseignant ou de l'enseignante, cette démarche constitue un mode particulier de gestion de la classe, en l'occurrence un mode qui possède plusieurs affinités avec l'"animation pédagogique", la "supervision pédagogique" et la "gestion participative de la classe". Essentiellement, elle consiste à faire la classe en s'appuyant largement sur des activités qui rejoignent tous les élèves, sollicitent leur curiosité et leur persévérance et multiplient entre eux les interactions et les occasions de collaboration orientées vers des objectifs précis d'apprentissage à atteindre.
Passant de l'angle psycho-social à l'angle cognitif, on peut définir ainsi, toujours en se plaçant du côté de l'enseignant ou de l'enseignante, ce que signifie une approche par projet avec l'ordinateur en réseau : l'engagement de chaque élève et de tous les élèves dans des activités qui visent des objectifs d'apprentissage personnels, d'équipe et de classe, et ce, en misant sur leurs connaissances antérieures et en "échafaudant" leurs démarches d'exploration, de compréhension, de résolution de problèmes et de production de résultats collectifs tangibles. La gestion de classe suggérée dans les pages qui suivent s'appuie sur cette définition et celle du paragraphe précédent.
La démarche proposée comprend trois phases : la préparation, l'exécution et l'exploitation du projet. Sur un plan opérationnel, on peut donc affirmer que l'approche par projet avec des ordinateurs en réseau consiste à préparer, à exécuter et à exploiter pédagogiquement des activités réalisées par des élèves en interaction les uns avec les autres et avec diverses ressources, notamment celles du réseau informatique auquel ils sont reliés.
Par sa nature même, un projet est une activité limitée dans le temps et aboutit à une réalisation originale ou à un service concret (inspiré de PMI Standards Committee, 1996, p. 4). Chacune des phases conduit à un résultat bien déterminé; à la fin de la première phase, le résultat est un plan, de la deuxième, une ou plusieurs "productions" et, de la troisième, des signes ou manifestations du savoir collectif de la classe.
La démarche relative à un ou, éventuellement, à plus d'un projet en même temps peut, selon les cas, occuper une place plus ou moins grande à l'intérieur de l'horaire scolaire. Un enseignant ou une enseignante peut aussi utiliser une approche par projet couramment ou seulement de temps à autre. Deux enseignants ou enseignantes, ou plus, qui enseignent la même matière ou des matières différentes, peuvent encore, selon des modalités très variables, s'associer ensemble pour la réalisation d'un projet ou d'une série de projets. Une autre question, parfois difficile à régler, est celle des liens qui seront établis entre les objectifs d'un projet et ceux de telle ou telle partie du curriculum. Ce qui est possible sur ce point peut varier considérablement selon les écoles; il dépend des politiques de l'école, mais également du jugement professionnel des enseignants et des enseignantes.
La figure 1, ci-après, illustre dans leur continuité temporelle les trois phases mentionnées ci-dessus, de même que certaines activités majeures qui s'y rattachent. Les termes utilisés, en particulier pour les activités, demeurent indicatifs. Il en est de même pour leur succession, car si, logiquement, ces activités se succèdent, elles se recoupent presque toujours dans le déroulement réel d'un projet; en effet, pour en assurer la cohérence, il s'avère souvent nécessaire de revenir sur une étape antérieure pour de nouvelles clarifications ou certains réajustements. On ne réalise pas un projet d'apprentissage comme on construit un pont.
Cette figure peut être perçue dans sa globalité en deux ou en trois dimensions. Dans le premier cas, imaginez que votre groupe-classe est à bord d'un autobus scolaire et quitte temporairement l'autoroute pour prendre un chemin plus attirant, plus riche au plan paysager et fort probablement un peu plus long. Dans le deuxième cas, imaginez que votre classe est toujours à bord d'un autobus scolaire, mais que celui-ci se transforme temporairement en un avion qui décolle et effectue un vol, pour ensuite atterrir et poursuivre sa route par voie terrestre. Dans les deux cas, la linéarité, voire la routine du parcours, aura été rompue, car la classe, à un moment donné, aura pris un autre chemin ou se sera envolée, tout en respectant la direction déjà prise.
Compte tenu des pratiques habituelles en milieu scolaire, la démarche proposée ci-après apparaîtra peut-être à plusieurs comme une suite d'activités qui se produisent peu souvent en classe seulement. En fait, comme nous le verrons dans la section V, l'ordinateur en réseau offre des possibilités croissantes de collaboration entre différents partenaires afin de réaliser des projets collectifs et il y a tout lieu de croire qu'il y en aura encore davantage dans l'avenir. Avant tout, il importe que tout projet puisse contribuer clairement à l'atteinte des objectifs d'apprentissage fixés localement, pour le maître comme pour l'élève.
PREMIÈRE PHASE: LA PRÉPARATION D'UN PROJET
Contrairement à ce qui se passe pour un vrai voyage, où les découvertes effectuées justifient la peine ("Ce détour valait la peine", dit-on), le fait que les personnes à bord de l'autobus ou de l'avion évoqués ci-dessus empruntent un trajet où ils semblent apprendre davantage et mieux ne suffit habituellement pas. De tierces personnes, plus ou moins nombreuses et occupant des fonctions plus ou moins élevées selon le projet en cause, ont aussi leur mot à dire avant qu'un projet ne soit reconnu comme réussi à l'extérieur de la classe. C'est le cas, par exemple, pour la direction de l'école, les parents, le conseil d'établissement, les autorités scolaires et le ministère de l'Éducation. Plus un projet est susceptible d'attirer l'attention ou de requérir des ressources, plus il s'avérera nécessaire de tenir au courant les instances concernées et d'être sensible à leurs attentes. Si emballant que soit un projet, il sera considéré comme "un détour non nécessaire", voire comme "une perte de temps", si les personnes responsables n'en ont pas saisi l'intérêt et la portée.
C'est à l'enseignant ou à l'enseignante qu'il revient de décider de l'à-propos de s'engager avec sa classe dans un projet et du genre de projet dont il s'agira (court ou long, autour d'une notion ou d'un thème, disciplinaire ou interdisciplinaire, etc.). En faisant appel à son jugement professionnel, il ou elle anticipera également, entre autres, quels liens seront établis avec l'une ou l'autre matière d'enseignement et les programmes d'études officiels, quelles tâches seront réalisées individuellement ou en petit groupe par les élèves et si, en relation avec le projet, la classe aura des contacts avec d'autres classes, des experts ou expertes ou la communauté locale.
La pertinence pédagogique d'un projet et sa faisabilité sont deux des critères qui serviront à éclairer l'enseignant ou l'enseignante dans sa prise de décision. Le premier de ces critères l'invite à se rappeler que le temps de classe est précieux, que des objectifs terminaux doivent être atteints, que les orientations relatives au curriculum convenues localement doivent être respectées et que, compte tenu du temps disponible, des objectifs fixés et des orientations retenues, tous les élèves doivent pouvoir faire une démarche d'apprentissage significative. Quant au critère de faisabilité, il incite plus spécialement à tenir compte du temps estimé requis pour le projet, des ressources disponibles (équipement, logiciels, documents divers, etc.), des appuis prévisibles et de la capacité des élèves. Celle-ci, il convient de le rappeler, doit être considérée comme dynamique, et non statique; dans un projet dont l'objet est l'apprentissage, il va de soi que la capacité des élèves s'accroîtra au cours de son développement.
Lors de la préparation d'un projet, les principales activités à gérer qui semblent ressortir d'expériences récentes ou en cours sont les suivantes :
L'idée d'un projet, ou d'un projet ayant tel thème, peut provenir de plusieurs sources et se présenter dans des contextes extrêmement différents. Avant tout engagement de sa part, il appartient à la classe de répondre au moins aux deux questions suivantes : de quoi s'agit-il plus précisément? Nous, comme classe, que désirons-nous faire?
Que l'initiative provienne de l'enseignant ou de l'enseignante, d'un ou d'une élève ou d'un groupe d'élèves, apprendre ensemble par projet signifie que toute la classe aura très tôt l'occasion d'en discuter. L'idée d'un projet peut aussi surgir au cours d'une discussion courante en classe, alors que, par exemple, les élèves manifestent un intérêt particulier pour une question ou un problème. En toute hypothèse, l'appropriation du projet par les élèves est une condition indispensable à sa réussite. L'accord sur un plan écrit constituera le signe concret de cette appropriation.
Ce plan contiendra, entre autres, en plus d'une description du thème retenu, des objectifs d'apprentissage et des critères d'évaluation(5). Les objectifs porteront sur les concepts, les notions et les autres éléments essentiels inclus dans le thème, sur les habiletés et, éventuellement, les attitudes qu'il cherchera plus particulièrement à développer et, enfin, sur les résultats ou "productions" à travers lesquels les élèves exprimeront ce qu'ils ont appris. Quant aux critères, ils permettront d'évaluer les résultats atteints et de les situer par rapport à la maîtrise jugée appropriée dans les circonstances.
La possibilité, pour les élèves, d'imaginer l'oeuvre collective à produire est de nature à stimuler leurs habiletés métacognitives (ainsi, ils commenceront spontanément à faire des plans, à avancer des suggestions sur la façon de procéder, etc.). Étant donné que l'ordinateur branché en réseau à des fins d'apprentissage dans un cadre scolaire est un nouvel outil, le plan accordera aussi, dans de nombreux cas, une place à la maîtrise des habiletés requises pour utiliser avec profit, à des fins d'apprentissage, l'équipement et les logiciels disponibles. Le programme Rescol à la source, comme d'autres expériences d'ailleurs, a montré que les lacunes des élèves sur ce point méritaient une attention particulière.
Les autres sections de ce guide, et plus particulièrement la section II, contiennent maintes autres indications qui peuvent s'avérer utiles au cours de cette phase du projet.
(5) Ces critères sont ceux qui serviront à l'enseignant ou à l'enseignante pour l'évaluation individuelle des élèves au cours du déroulement du projet et à la fin de la deuxième phase de la démarche.
2. Le repérage des ressources requises
Toute approche par projet implique une grande préoccupation pour les ressources auxquelles les élèves auront accès. L'utilisation d'ordinateurs en réseau confère à cette question une nouvelle dimension, qui requiert une attention toute spéciale.
Dans n'importe quel projet, les ressources auxquelles on peut faire appel sont a priori multiples. Toutefois, elles ne sont pas toutes également pertinentes. Et même parmi les ressources pertinentes, des choix, souvent difficiles, s'imposent. Ce que connaissent déjà les élèves et leur enseignant ou enseignante sur le thème du projet et l'habileté d'au moins certains élèves à utiliser des sources telles que les bibliothèques, des organismes locaux, des entreprises, des institutions publiques et Internet constituent les premiers éléments à prendre en compte. Viennent ensuite l'équipement et les documents (écrits, visuels, informatiques ou autres) aisément accessibles dans la classe ou l'école. Le plan dont il a été question dans l'activité précédente indiquera, toujours en collaboration avec les élèves, quelles ressources seront privilégiées et ce qui sera fait pour s'assurer qu'elles seront vraiment disponibles ou accessibles. Au besoin, un temps d'initiation sera prévu. Peut-être faudra-t-il prévoir aussi l'achat d'un logiciel, d'un cédérom ou de quelque autre document ou l'obtention d'une permission pour pouvoir se rendre à tel endroit ou interviewer telle personne.
L'échelonnement du projet dans le temps, la manière dont le travail sera réparti entre l'enseignant ou l'enseignante, les élèves et les groupes d'élèves et les autres éléments relatifs à l'organisation du travail seront planifiés en fonction des objectifs d'apprentissage visés par le projet, mais aussi des acquis et des intérêts des élèves.
Planifier un projet d'apprentissage, c'est en préciser le thème, déterminer ses objectifs et les critères qui seront utilisés pour juger de leur maîtrise et prévoir les ressources requises pour le réaliser, mais aussi donner corps à tous ces éléments dans une organisation concrète du travail. Cette organisation devra permettre à chaque élève et à chaque groupe d'élèves d'apporter une contribution significative et de consolider des connaissances et des habiletés, de même que d'en intégrer de nouvelles (voir Talbot, 1990, p. 113). Dans certains cas, des "contrats d'apprentissage" clarifieront ces divers points de manière utile pour tous.
Pour favoriser les interactions entre les élèves et permettre à chacun d'apporter une contribution et de développer diverses capacités, il existe plusieurs méthodes ou stratégies éprouvées. Ce qu'il est convenu d'appeler l'apprentissage coopératif en est une. La méthode consistant à demander à un élève de creuser un aspect d'un sujet et de communiquer ensuite ses résultats à son groupe pour discussion en est une autre. On peut également penser, entre autres, à un système où, par rotation, un représentant de chaque groupe se rend dans un autre groupe pour faire part des résultats du travail de son propre groupe. On évitera par ailleurs toute fragmentation du travail qui ne permet plus à l'élève de faire le lien entre ce qu'il accomplit et quelque chose de plus large.
Organiser le travail suppose aussi que la classe se donne des règles de fonctionnement, y compris sur le plan éthique (reconnaissance du travail de chacun, mention des sources, attention prêtée à toutes les opinions, etc.). Plus ces règles apparaîtront aux élèves comme nécessaires pour atteindre les objectifs du projet, moins l'enseignant ou l'enseignante devra consacrer de temps à les faire respecter. Le respect spontané des règles convenues par les élèves sera l'un des meilleurs indicateurs de l'intérêt que suscite le projet chez les élèves et de l'application qu'ils mettent à sa réalisation.
DEUXIÈME PHASE: L'EXÉCUTION DU PROJET
Au cours de cette phase, le projet prend forme et devient vivant. La matière première de la classe, c'est alors de l'information (au sens le plus large du terme). Tantôt individuellement et tantôt en petit groupe, mais toujours dans une optique de collaboration à un résultat commun et avec le soutien de leur enseignant ou de leur enseignante, les élèves recherchent, transforment ou créent de l'information. À cette fin, ils réunissent des données, effectuent des expériences, rencontrent des personnes-ressources, analysent, comparent, pèsent, mesurent, calculent, écrivent, dessinent, discutent et, selon leur âge et le thème en cause, effectuent plusieurs autres opérations similaires.
Pendant que tout ce remue-méninges se produit, l'enseignant ou l'enseignante garde un oeil sur le respect du plan prévu et, de l'autre, veille à ce que les interactions et la collaboration entre les élèves contribuent à bâtir une communauté dont la préoccupation centrale est l'apprentissage. En conséquence, il ou elle favorisera une communication fréquente et ouverte entre les élèves, fera circuler l'information sur la documentation disponible auprès des responsables de telle ou telle tâche, invitera les équipes à faire régulièrement le point sur l'évolution de leur travail, effectuera de temps à autre des retours avec toute la classe et profitera de cette occasion pour encourager, stimuler et, au besoin, rectifier le tir.
C'est sans doute au cours de cette phase que l'ordinateur sera le plus utilisé. La consultation et, éventuellement, la production de ressources en ligne ajouteront une plus-value qu'il serait bien difficile d'obtenir autrement. Soulignons que la section V, ci-après, mentionne plusieurs ressources qui sont de nature à enrichir, à accélérer et à faciliter les travaux requis durant les activités décrites dans les paragraphes qui suivent.
Pour bien situer cette phase et les deux activités-clefs qui y sont prévues dans l'ensemble de la démarche, on trouvera probablement utile de se reporter à la figure 1, ci-dessus.
4. L'élaboration progressive d'une pensée et de documents
En suivant le plan convenu au cours de la première phase, les élèves apprennent en recherchant, en transformant et en créant de l'information et s'appliquent à concrétiser le résultat de leur apprentissage dans une production ou un service tangibles. Pensée et documents (au sens large du terme) évoluent de pair.
L'exploitation en classe des possibilités de l'ordinateur branché en réseau comporte maints avantages, dont ceux de fournir des données à jour sur un grand nombre de sujets et de problèmes réels et de faciliter la collaboration entre élèves d'une même classe ou avec d'autres classes, mais présente aussi plusieurs défis. Ainsi, la recherche sur Internet par de jeunes élèves de renseignements pertinents et précis peut s'accompagner de tâtonnements frustrants, même dans les cas où la préparation de ces élèves à utiliser l'ordinateur en réseau est considérée comme satisfaisante. Le dosage des difficultés reliées à l'utilisation de l'ordinateur que les élèves, même de la fin du secondaire, auront à affronter devra préoccuper l'enseignant ou l'enseignante. Ce qui pourra être demandé dépendra notamment, en plus de l'acquis des élèves, du genre de travaux poursuivis et des logiciels -ou collecticiels- disponibles.
Les stratégies d'engagement ou, à l'opposé, d'évitement qu'emploient les élèves est un autre point qui devra faire l'objet d'une observation continue de la part de l'enseignant ou de l'enseignante. Même si de nombreuses expériences démontrent que l'utilisation de l'ordinateur à des fins d'apprentissage accroît la motivation des élèves (voir Réginald Grégoire inc., Bracewell et Laferrière, 1996, p. 9), il reste que, devant les difficultés inévitables de la réalisation du projet, certains élèves seront tentés de s'en tenir à une adhésion de convenance seulement. L'intervention de l'enseignant ou de l'enseignante pourra se révéler nécessaire (voir Meyer, Turner et Spencer, 1997). Sur ce point comme sur le précédent (concernant l'habileté à utiliser un ordinateur en réseau), le même principe vaut : les élèves doivent se sentir capables d'atteindre les objectifs fixés ou des mesures doivent être prises pour qu'ils en deviennent capables. Les dispositifs de coordination et de supervision mis en place et le genre de soutien apporté varieront selon la capacité des élèves et la nature des activités. Ils favoriseront l'autonomie des élèves et des groupes d'élèves et mettront l'accent sur l'apprentissage lui-même plutôt que sur la perfection des productions, sans cependant minimiser la nécessité de toujours viser à des productions de qualité.
5. La coordination et la synthèse des contributions
Pour l'essentiel, cette activité en est une de synthèse. Elle implique beaucoup de coordination. Elle s'articule habituellement autour de deux volets : la présentation à l'ensemble de la classe des contributions des petits groupes, et à l'occasion de l'un ou l'autre élève, et la mise au point d'une production collective(6) de la classe elle-même.
(6) Cette production, rappelons-le, peut revêtir de multiples formes, y compris, comme dans certains projets du réseau I*EARN, celle d'un service concret (voir ci-dessus, III, 2).
Les diverses contributions seront préparées et présentées en fonction du plan convenu au cours de la phase préparatoire ou modifié par la suite. Chaque présentation sera suivie de questions et de commentaires, ainsi que d'une discussion sur ce qu'elle apporte à la production collective de la classe. L'enseignant ou l'enseignante fera ressortir tout particulièrement les aspects positifs, mais soulignera aussi ce qui aurait pu être plus approfondi ou fait autrement. Cette activité peut également donner lieu, dans une ambiance détendue, à des interrogations sur le travail en groupe, la responsabilité, les méthodes de recherche, la distinction entre le vrai et le faux, le rôle de l'enseignant ou de l'enseignante et beaucoup d'autres thèmes ... et conduire à des propositions intéressantes pour de futurs projets.
La mise au point d'une production collective peut requérir un temps appréciable. Par la force des choses, l'enseignant ou l'enseignante est appelé à intervenir plus directement devant toute la classe au cours de cette activité que durant l'élaboration des productions à l'intérieur de petits groupes. Toutefois, pour certains aspects, les élèves peuvent être appelés à travailler de nouveau en groupe. Ce sera probablement le cas, par exemple, si la production collective est un journal, un montage sonore ou une série de graphiques ou implique un déplacement à l'extérieur de l'école (v.g. dans un foyer pour personnes âgées).
TROISIÈME PHASE: L'EXPLOITATION PÉDAGOGIQUE DU PROJET
Tout projet prend place dans un continuum. Si on l'a entrepris, c'est parce qu'il avait un sens dans le cheminement d'apprentissage de la classe et, plus précisément, parce qu'il soulevait un intérêt de la part des élèves et correspondait à des objectifs d'apprentissage jugés souhaitables ou, plus probablement, impératifs. Dans la maîtrise de connaissances, d'habiletés et d'attitudes, il a donc constitué un passage d'une étape à une autre. De quoi sera faite cette prochaine étape? La réponse aux trois questions suivantes devrait permettre d'en baliser au moins l'orientation générale :
Dans les paragraphes qui suivent, une première activité, "Le retour sur le projet", revient sur les deux premières questions et une seconde activité, "Les suites au projet", sur la troisième.
La production collective réalisée reflète les efforts d'apprentissage accomplis. Il faut maintenant revenir sur le tout pour opérer un bilan et en intégrer les conclusions dans un ensemble encore plus large.
Ce retour, adapté par l'enseignant ou l'enseignante à l'âge des élèves et aux caractéristiques du projet réalisé, pourrait avoir comme axes les dimensions métacognitive, cognitive et sociale. Il existe plusieurs manières de le réaliser : la discussion avec toute la classe ou en petits groupes, des tests suivis de commentaires sur les résultats, des jeux, des applications dans un contexte légèrement différent, etc.
Le retour effectué sur la dimension métacognitive permettra aux membres de la classe de s'interroger sur la façon dont, individuellement et collectivement, ils se sont engagés dans le projet. Ainsi, ont-ils exécuté machinalement les tâches prévues ou ont-ils cherché une réponse à des questions? Placés devant des situations plus difficiles, ont-ils fait appel à plus d'une stratégie? Ont-ils, dans l'ensemble, travaillé avec méthode? Ont-ils évalué régulièrement où ils en étaient? Ont-ils été persévérants? Ont-ils fait un effort pour mémoriser certains renseignements? Tout compte fait, quels processus mentaux ont été utilisés ... et lesquels sont demeurés en friche?
Le retour sur la dimension cognitive conduit à une interrogation sur ce qui a été appris et à l'intégration qui en a été faite. Il pourrait s'articuler autour de questions telles que : dans quelle mesure les objectifs d'apprentissage prévus ont-ils été atteints? Au cours de la réalisation du projet, quels liens a-t-on faits avec des apprentissages antérieurs? Quelles interrogations sont demeurées sans réponse ou n'ont reçu qu'une réponse peu satisfaisante? Ce projet a-t-il été l'occasion de faire des apprentissages dans le domaine de la langue? En histoire? En mathématiques? Dans une autre matière scolaire? Dans les mêmes matières, a-t-on constaté certaines lacunes qui ont nui au bon déroulement du projet?
Enfin, le retour sur la dimension sociale, qui est d'une grande importance dans l'approche par projet, ouvre la voie à une discussion sur certaines valeurs (l'attention aux autres, la responsabilité, la conscience critique, l'attitude démocratique, etc.) et suggère des questions telles que : qu'a-t-on retiré du fait d'avoir travaillé avec d'autres sur un même sujet? Qu'est-ce qui s'est révélé le plus difficile? Comment pourrait-on rendre le travail en groupe plus motivant?
Ces suites, ou prolongements, peuvent avoir la classe comme cadre, mais aussi un champ d'action plus large. Par ailleurs, elles peuvent être proprement pédagogiques ou porter sur des aspects dont l'incidence pédagogique est moins évidente.
Les résultats du projet ne seraient-ils pas utiles à d'autres classes de l'école ou d'une autre école? Certains de ces résultats ne pourraient-ils pas être disponibles par le réseau Internet? Ne conviendrait-il pas d'inviter les parents et, peut-être, d'autres personnes (le directeur de l'école, des personnes consultées pour les fins du projet, etc.) à une exposition sur les résultats du projet ou à une présentation spéciale de ces résultats préparée à leur intention? Voilà quelques questions peu fréquentes dans une école ordinaire, mais qui surgissent spontanément dans une approche par projet.
Il se peut aussi que, à la suite du retour sur le projet, il soit jugé opportun de confier à un petit groupe le soin de compléter l'information relative à un aspect particulier du projet ou de revenir en classe sur certains apprentissages de base moins bien assimilés qu'on ne le croyait. L'approche par projet conduit aussi à découvrir que le contenu et la logique des programmes d'études ne sont pas toujours les mêmes que ceux qui s'imposent dans la salle de classe!
Le projet réalisé aura sans aucun doute suscité le désir d'entreprendre d'autres projets. L'enseignant ou l'enseignante recueillera précieusement, pour considération au moment opportun, les suggestions faites.
Si le projet a eu une certaine ampleur, il est probable que certaines personnes en dehors de la classe ont été consultées ou ont rendu l'un ou l'autre service à un petit groupe ou à la classe. Ne conviendrait-il pas, dans le cadre d'un mini-projet, de les remercier et de leur faire part du résultat final du projet? Peut-être y aurait-il lieu aussi de transmettre à la direction de l'école ou à d'autres instances des suggestions sur ce qui pourrait être fait pour faciliter la réalisation de futurs projets ou en accroître le nombre.
VERS UNE INTELLIGENCE COLLECTIVE ...
Un projet sera d'autant plus réussi que la participation des élèves et leur contribution au thème auront eu des retombées sur l'ensemble de la classe. Il en sera ainsi si, par exemple, les "artefacts" ou productions d'un petit groupe d'élèves ont réussi à intéresser d'autres élèves et leur ont permis d'élargir ou de raffiner leurs propres apprentissages. Une classe manifeste qu'elle devient une communauté d'apprentissage lorsque les élèves arrivent à converser sur divers thèmes, questions et problèmes en utilisant les concepts appropriés, à exprimer de nouvelles idées et à débattre du sens de notions ou de principes. Le savoir collectif de la classe se manifeste à travers les analogies mises de l'avant, les réseaux de concepts établis lors de mises en commun, les scénarios proposés et les textes narratifs ou récits ("stories"(7)) développés par la classe sur un sujet donné. Revenant aux fondements conceptuels évoqués dans la section III, ces manifestations de ce que les élèves ont appris sont en fait des manifestations de sens, soit les interprétations que les élèves en sont venus à partager concernant un objet d'apprentissage donné ("shared meanings"). Plus intangibles, mais non moins probantes en tant que manifestations de l'existence d'une classe, communauté d'apprentissage, sont l'esprit et les habitudes de collaboration que les élèves développeront. Les propos du philosophe Pierre Lévy (1997) sur le sujet sont inspirants : "L'idéal mobilisateur de l'informatique, affirme-t-il, n'est plus l'intelligence artificielle (rendre une machine aussi intelligente, voire plus intelligente qu'un homme), mais l'intelligence collective, à savoir l'utilisation optimale et la mise en synergie des compétences, des imaginations et des énergies intellectuelles, quelle que soit leur diversité qualitative et où qu'elle se situe" (p. 201).
(7) Les travaux de Roger Schank (1990), une figure-clé en intelligence artificielle, mettent en lumière l'importance de la narration en tant que mode de connaissance. Puisqu'il n'est pas facile de se souvenir des abstractions, il soutient qu'il faut faire des stories, dont la personne arrive mieux à se rappeler et qui donnent vie à l'expérience passée.
La pratique d'une pédagogie par projet et l'ordinateur en réseau sont considérés ici comme indissociables. Cet ensemble intégré possède d'immenses potentialités, mais il est certain aussi qu'il est exigeant, tant pour les élèves que pour les enseignants et les enseignantes. Ceux-ci feront appel à leur expérience pour favoriser des apprentissages plus signifiants et une gestion de classe plus participative. Leurs stratégies de travail coopératif, de gestion du temps et de résolution de conflits leur seront utiles, mais ils auront sans doute également besoin d'élargir et d'approfondir leur formation, dans le cadre d'un projet d'apprentissage, individuel ou collectif, qu'ils se seront eux-mêmes donné.
Par ailleurs, une compréhension ou une expérience trop limitées des approches pédagogiques non traditionnelles constitueront un obstacle. En outre, que l'enseignante ou l'enseignant intéressé connaisse déjà ou non l'approche par projet, il aura à surmonter d'autres difficultés : le manque d'habileté au plan technique, le peu de ressources pédagogiques et de pratiques exemplaires sur lesquelles s'appuyer, l'accès restreint à des ordinateurs en réseau, des délais de tous genres (concernant l'équipement, l'achat de logiciels, la formation disponible, etc.), des mouvements de personnel peu heureux, la nature même des programmes scolaires et les caractéristiques des élèves (voir In-Sook, 1996 et Collis, 1996). Néanmoins, comme le démontrent les expériences citées ou évoquées ici et là dans ce guide, de nombreux enseignants et enseignantes sont déjà à l'oeuvre.
La section II, ci-dessus, dégage cinq constats concernant le genre de projets en cours ou réalisés ces dernières années. Ces constats fournissent des orientations qu'il serait bon d'avoir en tête au moment de sélectionner des ressources et de décider de leur utilisation à l'intérieur d'un projet précis.
L'accès à de l'information, à des modèles, à du soutien et à des outils est nécessaire pour la réalisation de projets allant dans le sens proposé dans ce guide. Dans ces domaines, l'ordinateur en réseau offre des possibilités inouïes. Les pages qui suivent fournissent un bref aperçu de ressources jugées utiles, regroupées sous cinq catégories. Celles-ci mettent respectivement l'accent sur des ressources qui contiennent une information abondante et variée; favorisent le dialogue et l'échange d'idées; introduisent dans le monde des projets en tant que tels, dans toute leur diversité; apportent un soutien logistique à la collaboration et, de plus en plus fréquemment, à la "télécollaboration" qu'exige une approche par projet et, enfin, permettent aux enseignants et aux enseignantes de s'informer mutuellement, de s'entraider et de parfaire leur formation. Chacune de ces catégories répond à une préoccupation particulière. Cependant, toutes les ressources indiquées ayant en vue, sous un angle ou l'autre, la réalisation de projets d'apprentissage et les hyperliens et autres croisements étant quasi sans fin sur Internet, on pourra aussi tirer profit de plusieurs recoupements entre les ressources de l'une ou l'autre catégorie.
Tous ces sites ont été créés et sont maintenus par des organismes publics ou parapublics, des fondations, des associations, des équipes de recherche ou, parfois, des personnes qui y consacrent bénévolement beaucoup de leur temps. En conséquence, l'accès à la plupart d'entre eux est gratuit; toutefois, dans certains cas, une inscription est nécessaire.
1. DES MÉGASITES DE RESSOURCES " EN LIGNE "
Ces répertoires sont assimilables à des répertoires de ressources d'information, mais ils contiennent aussi, quoique à des degrés variables, des renseignements substantiels sur plusieurs sujets. Selon toute probabilité, leur nombre et leur valeur croîtront au cours des prochaines années.
Des liens sont prévus avec les sites des ministères de l'Éducation de chacune des provinces, qui contiennent, eux aussi, un grand nombre de documents pertinents. En bref, la personne qui consulte le site de Rescol Canada est assurée de pouvoir accéder à la très grande majorité des sites de ressources électroniques d'origine canadienne reliés à l'éducation.
2. DES SITES CENTRÉS SUR DES ÉCHANGES D'INFORMATION ET D'IDÉES À L'ÉCHELLE PLANÉTAIRE
3. DES SITES WEB SPÉCIALISÉS FAVORISANT LA COLLABORATION DES ACTEURS
4. LOGICIELS-OUTILS DE TÉLÉCOLLABORATION SUR INTERNET
En tant qu'outil de collaboration de première génération et fonctionnant sur un intranet, First Class (http://www.fcas.softarc.com/) a rendu possibles les activités du Village Prologue à des centaines de jeunes francophones. La création du Web a donné lieu au développement de logiciels permettant l'édition de pages Web et de travaux d'élèves. C'est le cas pour le populaire logiciel HyperStudio (http://www.hyperstudio.com/), qui est également disponible en français. HyperPage est un logiciel d'origine québécoise qui remplit des fonctions similaires. Il existe de nombreux autres logiciels qui sont utiles pour la réalisation de projets effectués en collaboration. Ainsi, par exemple, les logiciels Inspiration (http://www.inspiration.com/) et Stella (http://www.stella.com/)permettent de créer des cartes représentant des réseaux de concepts et de les publier sur le Web (voir Hyerle, 1996).
Ce sont cependant les outils de deuxième génération, soit des sites Web qui constituent de véritables environnements d'apprentissage en collaboration ("Web-based Software"), qui sont les plus adaptés à l'orientation générale de ce guide. Les élèves travaillent directement au sein de ces espaces virtuels et y prennent connaissance du travail effectué par des élèves d'ailleurs aussi bien que de leur propre classe. L'enseignant ou l'enseignante guide ses élèves dans ces environnements qui, en fait, sont des pages Web spécialement conçues afin de soutenir l'apprentissage en collaboration. De nouvelles pages, avec des illustrations et, dans certains cas, du son et des images vidéo, peuvent être facilement créées et déposées directement par l'usager (enseignant, enseignante ou élève) dans le serveur du site. Aucun achat de logiciels intermédiaires n'étant requis (par exemple, pour l'édition d'une page Web) et la gestion d'un équipement technologique local étant réduite au minimum -- elle est assurée à distance --, des frais sont habituellement chargés pour l'utilisation de tels sites.
5. LES COMMMUNAUTÉS DE PRATIQUE
Apprendre ensemble par projet signifie aussi que l'enseignant ou l'enseignante n'avance pas seul dans son développement comme professionnel ou dans ses essais d'ordre pédagogique. Avec l'ordinateur en réseau, il est important que les enseignants et les enseignantes qui innovent dans leur propre milieu appartiennent à une "communauté de pratique". Une telle communauté regroupe, face à face ou en mode virtuel, des personnes qui pratiquent le même métier ou la même profession, partagent des préoccupations semblables et interagissent, entre autres, sur leurs savoirs d'expérience. Elle favorise les échanges de vues sur des situations et la réalisation de projets communs, offre un soutien au besoin et, avant tout, est un lieu de formation entre pairs. Le Web offre aux enseignants et aux enseignantes la possibilité d'appartenir à une ou à plusieurs communautés virtuelles axées sur un aspect ou l'autre de leur pratique professionnelle. En voici des exemples :
Pour assurer le renouvellement des pratiques pédagogiques, une communauté virtuelle ne peut remplacer le soutien des autorités locales et de collègues proches, mais elle peut accueillir des enseignantes et des enseignants intéressés par l'approche par projet et, quoique peut-être moins fréquemment, des équipes d'enseignants et d'enseignantes à la recherche de ressourcement.
Aussi, vous est-il proposé de joindre la communauté de pratique Rescol à la source (http://www.rescol.ca/alasource). Celle-ci sera animée par les membres de l'Équipe TACT (Télé-Apprentissage Communautaire et Transformatif) qui ont collaboré de plus près à la réalisation du présent guide. Chacune des cinq sections du guide servira respectivement de base de discussion aux forums qui seront ouverts afin de mettre sur pied cette communauté. Les projets Rescol à la source, préparés et planifiés, dans la plupart des cas, par un enseignant ou une enseignante constituent du matériel de première main à partir duquel une réflexion pourra être menée et de nouveaux projets élaborés. On y discutera, par exemple, de l'introduction de nouvelles routines en classe, du rôle des élèves dans une démarche par projet avec l'ordinateur en réseau, de la gestion de projets d'apprentissage et des moyens de faciliter l'apprentissage de tous les élèves.
Le nouveau rôle pédagogique des enseignants et des enseignantes que laisse entrevoir le présent guide est de nature à répondre à une demande sociale nettement plus élevée dans une société du savoir où les connaissances et les habiletés requises deviennent toujours plus complexes. L'ordinateur en réseau rend possible un ressourcement continu lorsque des pédagogues acceptent d'engager un dialogue. À titre de conclusion de ce guide et d'ouverture à ce dialogue prometteur, voici les propos d'une enseignante qui possède plusieurs années d'expérience en pédagogie de projet.
Comme enseignants ou enseignantes ou élèves, quelle belle aventure il nous est possible de vivre lorsque nous travaillons par projet avec les technologies qui nous relient à des réseaux!
En effet, dans le cadre de projets, élèves et enseignants ou enseignantes redécouvrent leur liberté de penser et leur droit de vivre de nouvelles expériences éducatives. Ensemble, ils s'intéressent à autre chose qu'à des connaissances; savoir, c'est aussi savoir penser, savoir devenir, savoir vivre ensemble. En tant qu'enseignante qui associe les élèves au choix des thèmes des projets, de même qu'à l'animation des équipes et à l'évaluation des résultats, je me sens portée par un courant de vie et suis sans cesse surprise par la créativité et la motivation des jeunes.
Je participe à ce beau changement de l'ordre social : redonner la parole aux jeunes en dehors des hiérarchies créées par les adultes et leurs organisations. Les réseaux ouvrent de nouveaux canaux de communication. En utilisant le courrier électronique, les jeunes peuvent entrer directement en contact avec leurs ministres et diverses autorités, leurs auteures et auteurs préférés et, peut-être devrions-nous ajouter, avec leurs enseignants ou enseignantes. Par voie de conséquence, ceux-ci ou celles-ci connaissent ce que pensent les jeunes avec lesquels ils ou elles sont régulièrement en contact. Assez curieusement, les structures qui ont été si patiemment mises sur pied sont court-circuitées par les nouveaux réseaux électroniques!
Les règles du jeu des nouveaux moyens de communication concordent avec les façons de vivre des jeunes et influencent leurs valeurs. Ainsi :
- Grâce à Internet, tout est disponible en même temps; il suffit de "zapper" et ce qui est souhaité apparaît instantanément.
- À l'intérieur d'une équipe, on peut, au moment où on y pense, poser une question, donner une opinion, faire part de sa difficulté de vivre ou partager un bon coup. En somme, on met ses idées "en conserve". Tôt ou tard, une autre personne, un ami ou une enseignante par exemple, y fera écho.
- La terre est vraiment devenue ce "village global" que prévoyait Marshall McLuhan. Un claquement des doigts et des gens des Îles-de-la-Madeleine ou de l'Allemagne sont là pour répondre à une question ou simplement pour bavarder.
- Que ce soit ou non dans le cadre de projets, les jeunes ne sont plus passivement à l'écoute de leur enseignant ou enseignante; ils sont vraiment actifs.
Lorsque, enseignant ou enseignante et élèves, nous réalisons un projet en classe, nous adoptons un rythme qui s'apparente à celui de la vie. Les matières du programme servent à aborder et à comprendre le monde qui nous entoure; elles ne sont pas déconnectées de l'activité en cours. Aussi, chaque participante ou participant est reconnu pour sa compétence; la coopération est une règle d'or pour réaliser des travaux dont tous seront fiers.
Comme enseignants ou enseignantes, nous avons la responsabilité de participer à la formation de citoyens et de citoyennes capables de s'adapter à la vie du troisième millénaire, debout, actifs et engagés auprès de leurs semblables. C'est à nous que revient ce beau rôle de penser, d'établir des liens entre les élèves de nos classes et, en utilisant les ressources disponibles à l'extérieur de l'école, de présenter aux jeunes ce monde ouvert et fabuleux dans lequel ils vivent déjà et vivront demain.
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Thème
Adresse internet En anglais http://www.rescol.ca/grassroots/e/
project.centre/projects.asp?id=et ajouter :
1. Héroïnes et héros méconnus 2. Temps passé devant la télévision et émissions regardées 3. Gestion des déchets et autres aspects de l'environnement 4. Les baleines et les oiseaux du cap St. Mary's (Terre-Neuve) 5. Curiosités touristiques de la ville ou de la région 6. Pourquoi l'asthme est-il si répandu dans notre région? 7. Quelle invention technologique pourrait contribuer à résoudre les problèmes actuels de la Terre? En français http://www.rescol.ca/grassroots/e/
project.centre/projects.asp?id=et ajouter :
8. Aspects de l'univers 9. Les petits animaux qui vivent près de la maison ou de l'école des élèves 10. La production d'un journal quotidien sur Internet au cours d'un voyage d'un groupe d'élèves loin de leur école 11. Un organe du corps humain ou une invention
Genre
d'activités
- Individuelle
- En petit groupe
- Collective (Le plus souvent, la classe ou son équivalent)
Acteurs mis en relation de collaboration
- Une personne, un petit groupe ou une classe et, selon les cas, une autre personne, un autre petit groupe, une autre classe et toute autre personne ou tout autre groupe qui sont reliés au même réseau (intranet ou Internet)
Opérations
- Concernant l'information
- Accès à de l'information et transmission d'information
- Sous plusieurs modes de présentation: texte, schéma, carte, photographie, son, vidéo, etc.
- En relation avec toute matière enseignée en classe
- À partir de questions, de situations et de problèmes réels
- Concernant l'interaction entre personnes
- Échange de points de vue dans une perspective de compréhension ou d'approfondissement d'un sujet
- Établissement de consensus (sur une idée, une façon de procéder, un problème, une production concrète, etc.)
- Exercice d'habiletés intellectuelles et de comportements sociaux et apprentissage de méthodes de travail dans un contexte riche de sens
Types de
réalisations
- Des bases de données : statistiques ou synthèse sur un thème, liste d'adresses, etc.
- Des textes et/ou des présentations multimédias : sur une situation, un problème, une solution, une expérience, un auteur, etc.
- Des services : à une personne, à un groupe de personnes, à la collectivité en général, etc.
ACTEURS MIS EN RELATION |
|
Une personne et : |
|
une autre personne | Soit, par exemple, un élève de la même classe, mais aussi d'une autre classe, ou une personne-ressource de la région |
un petit groupe | Le plus souvent, le petit groupe auquel la personne appartient, mais aussi, éventuellement, un autre (par exemple, pour coordonner une recherche en cours avec ce que fait son propre groupe) |
une classe (ou son équivalent) | La classe à laquelle la personne appartient, mais aussi, éventuellement, une autre |
d'autres acteurs | Toute autre personne et tout autre groupe avec lesquels il est possible d'établir une communication électronique |
Un petit groupe et : |
|
une personne | Cette personne peut appartenir au groupe, mais aussi être, par exemple, une spécialiste résidant en Océanie |
un petit groupe | Le plus souvent, un petit groupe de la même classe, mais aussi, éventuellement, une équipe d'une classe d'un autre pays |
une classe | D'abord la classe à laquelle le groupe appartient, mais aussi, éventuellement, une autre |
d'autres acteurs | Voir ci-dessus |
Une classe et : |
|
une personne | Cette personne peut appartenir ou non à la même classe |
un petit groupe | De la même classe ou d'une autre classe, où qu'elle soit |
une classe | Cette classe peut être située dans n'importe quel pays |
d'autres acteurs | Voir ci-dessus |
GENRE D'ACTIVITÉS
OPÉRATIONS CONCERNANT
RÉSULTAT
NATURE
ACTEURS EN RELATION
L'INFORMATION
LES INTERACTIONS
ENTRE PERSONNES
ACTIVITÉS INDIVIDU-
ELLESUne personne
et :une autre personne
Repérer de l'information ou en transmettre
Entretenir une correspondance électronique
Un texte sur sa ville ou sa régionun petit groupe Faire rapport à son groupe de travail Justifier son opinion à l'intérieur d'un groupe de travail Une base de données sur un thème une classe Effectuer une présentation sur support informatique Animer une discussion sur un problème soulevé en classe Un article pour le journal de classe électronique tout autre site-réseau Créer une page Web Envoyer un message à un groupe de discussion La correction d'une fausse information sur un site ACTIVITÉS EN
PETIT GROUPEUn petit groupe
et:une personne
Initier à une façon de procéder ou de faire
Interroger un expert dans un autre pays
Information régulière transmise à une personne isoléeun petit groupe Échanger des informations Échanger des opinions Proposition d'une solution commune à un problème une classe Présenter à la classe un nouveau site jugé pertinent Faire découvrir, sous forme de jeu, des résultats d'une recherche Rapport sur un thème ou un sous-thème tout autre site-réseau Réunir sur un thème des données prove- nant de divers sites Discuter en ligne des résultats d'une même expérience Opinions ou renseignements ajoutés au contenu d'un site ACTIVITÉS COLLECTI-
VESUne classe et :
une personne
Renseigner une personne en autorité sur un problème local
Approfondir en classe un sujet avec une personne invitée
Un guide individualisé pour la consultation de certains sitesun petit groupe Indiquer avec clarté ce que l'on entend de chaque groupe ou équipe Interroger un petit groupe sur ses méthodes de travail Une synthèse du travail de chaque équipe une ou plusieurs classes Diffuser sur un réseau les travaux d'un travail de la classe Réaliser une recherche historique commune dans deux régions différentes Des pages Web communes sur un thème précis tout autre site-réseau Effectuer des "sorties" virtuelles Participer à un projet humanitaire international Contribution concrète à une activité à grande échelle