Le paradoxe tunisien
L'organisme
Reporters sans frontières compare la Tunisie à la Chine ou à
l'Irak en matière de liberté d'expression. Les guides voyages vantent
ce pays aux touristes. " Quel est donc ce paradoxal pays de neuf millions
d'habitants "?, demande Danny Braün dans son article " Le pays
muselé ", publié dans le numéro du 1er août 2002
du magazine L'Actualité.
"
La Tunisie est un joli décor. Tout le monde mange à sa faim, tout
le monde peut recevoir des médicaments. Mais le jour où vous ouvrez
la bouche pour critiquer le régime, vous vous retrouvez en prison ",
résume Karim, 18 ans, qui a passé huit mois en prison pour une affaire
de vol, sans jamais avoir été jugé. Il est tout simplement
révolté par la situation politique de son pays, tout comme plusieurs
jeunes de son âge; la moitié de la population de la Tunisie a moins
de 20 ans.
Officiellement,
la Tunisie est un pays de la liberté. Les femmes musulmans ont plus de
droits que dans tout autre pays arabe. L'économie est florissante. Le système
électoral semble démocratique. Par contre, le président Zine
el-Abidine Ben Ali a été élu lors des trois dernières
élections avec plus de 99 % des voix. Les Tunisiens eux-mêmes trouvent
que ces chiffres sont " un petit peu exagérés. De plus, "
les partis politiques, les journaux, les maisons d'édition et les associations
doivent être autorisés par le président en personne ".
Les sites Internet d'Amnistie Internationale, du quotidien Le Monde et de Radio-Canada
sont interdits.
Les
contestataires se font de plus en plus nombreux, même si c'est parfois au
péril de leur vie. Toutefois, certains Tunisiens croient encore au système
actuel. " La Tunisie n'est pas suffisamment avancée pour qu'on puisse
y instaurer un régime pluraliste [
], c'est au pouvoir de décider
si le peuple est prêt ou non pour la démocratie ", estime une
Tunisienne dans la trentaine.
Dans
les bureaux des ministères, on soutient qu'on n'empêche " pas
les gens de parler et de bouger " et qu'ils " sont bien traités
" en prison. Par contre, on avoue aussi " qu'il n'est pas facile de
mener le pays vers une société pluraliste et que des gens dans le
régime ont pris goût au pouvoir ". De plus, un employé
du ministère de la Justice reconnaît qu'il n'a pas " visité
de pénitencier depuis plus de 20 ans ".
À
faire en classe : dressez un portrait de la Tunisie. Comparez-le ensuite avec
un portrait du Canada; en terme géographique, mais aussi en terme social,
politique et économique. Que pouvons-nous faire ici qu'il est interdit
de faire là-bas? Quelles sont les différences marquantes entre les
deux pays? Y a-t-il des similitudes aussi?
Par
Martine Rioux