II - Les élèves en projet d'apprentissage dans un contexte d'intégration de l'ordinateur en réseau
 

L'école doit désormais former des citoyens conscients des enjeux auxquels font face les sociétés, conscients de leur responsabilité d'acteur social pour préserver la démocratie et construire un monde viable, capables d'être critiques et de participer activement à la construction de ce monde, ouverts aux autres et à la différence. Éduquer à la citoyenneté, c'est donc éduquer à la démocratie, au pluralisme et à l'engagement collectif. Cette tâche d'éduquer à la citoyenneté se situe aux confins des trois missions du système éducatif, celle de socialisation, celle d'instruction et de développement intellectuel et celle de qualification, puisque c'est en formant des individus "complets", outillés sur tous les plans que le système éducatif pourra prétendre avoir rempli adéquatement son rôle. 

Est-il nécessaire de rappeler les objectifs d'instruction, de qualification et de socialisation préconisés par le Conseil supérieur de l'Éducation? En ce sens, ne devons-nous pas privilégier des approches pédagogiques qui favorisent la participation des élèves à l'ensemble de la vie scolaire et institutionnelle? Il est alors nécessaire que les élèves puissent s'exercer à la démocratie en contexte d'apprentissage. Cela signifie que l'enseignant doit concevoir des projets et offrir des situations d'apprentissage qui puissent permettre à l'élève de développer un comportement démocratique. L'appropriation de ce comportement passe par une gestion démocratique du temps, des lieux et des activités d'apprentissage de manière à ce que l'élève apprenne à faire des choix dans le cadre de son association avec les personnes qui forment son premier environnement social. Il s'agit, plus précisément, de mettre l'élève en situation d'exercice de la démocratie par la prise de responsabilités multiples qui ont un rapport direct avec le fonctionnement de la classe. Dans cette perspective, l'approche par projet soutenue par les TIC constitue un indéniable atout parce qu'elle met les élève en contact direct avec des gens, des milieux et des institutions réelles.

Le programme PROTIC, qui fait appel aux technologies, tente de répondre aux objectifs du MEQ selon une perspective qui lui est propre.

Demandons-nous d'abord en quel sens nous entendons lier pédagogie et démocratie. Rappelons qu'à PROTIC, l'approche par projet est privilégiée. Si nous reconnaissons la nécessité pour l'élève de faire l'apprentissage de contenus précis (objectifs axés sur le savoir déclaratif), nous pensons, par ailleurs, que ces apprentissages doivent se faire au sein d'un environnement qui permettra à l'élève de développer une conscience collective. Voilà pourquoi il importe de réfléchir sur le modèle éducatif que l'équipe pédagogique entend mettre en place dans les classes PROTIC.

Précisons dès maintenant que la loi de l'instruction publique prescrit, depuis le 1er juillet 1998, l'instruction des élèves de même que leur qualification et leur socialisation. Le Conseil insiste, à cet égard, pour dire que les contenus d'enseignement ne doivent pas demeurer théoriques, ce qui revient à dire qu'il faut privilégier des approches pédagogiques qui favorisent la participation des élèves à l'ensemble de la vie scolaire et institutionnelle. La réussite de cette mission repose donc sur une approche pédagogique tournée vers la formation d'individus responsables. Il devient alors nécessaire que les élèves puissent exercer la démocratie en contexte d'apprentissage. Cela signifie qu'il faut concevoir les situations d'apprentissage en fonction de cette nécessité. Le cadre taxonomique de Discas (Développement Institutionnel : Services de Consultation et d'Animation Scolaires ) et, plus spécifiquement, celui qui a trait aux objectifs affectifs constitue à cet égard un modèle intéressant pour la mise en uvre de telles situations. Pour ceux et celles qui s'y intéressent, il est possible de le consulter à l'annexe A. Il incombe donc à l'enseignant d'offrir des situations d'apprentissage qui permettront à l'élève de développer un comportement démocratique. Dans cette perspective, l'approche par projet soutenue par les TIC constitue un indéniable atout parce qu'elle met les élève en contact direct avec des gens, des milieux et des institutions réelles.

L'intégration de l'ordinateur à la classe n'a de sens que dans le cadre d'un apprentissage actif. Ce n'est pas, en effet, par l'interaction personne/machine que le programme PROTIC se distingue, mais par l'interaction entre personnes qui disposent d'ordinateurs en réseau pour faire (ou faire faire) l'apprentissage des contenus au programme. Ce sont donc les logiciels-outils de base, soit ceux qui permettent d'obtenir de l'information et de produire des textes, des images, des animations et des sons, qui sont utilisés.

Par conséquent, l'appropriation des logiciels-outils de base ne constitue pas une fin en soi à PROTIC. L'initiation à leur emploi s'effectue en effet par le biais de leur intégration aux programmes scolaires, plus précisément par la réalisation de projets d'apprentissage qui peuvent inclure plus d'une matière. Comme nous le verrons dans les lignes qui suivent, l'approche par projet crée, de par sa nature même, un contexte favorable à l'intégration de l'ordinateur lorsque ce dernier est utilisé comme outil. Par ailleurs, les outils technologiques peuvent accroître la valeur des apprentissages réalisés en projet, parce qu'ils multiplient les possibilités d'échanges et de traitement de l'information. Le présent chapitre se veut donc une réflexion sur l'intégration de l'ordinateur dans le contexte de l'apprentissage par projet en prenant pour exemple une expérience concrète vécue en classe Protic. 

1. Spécificités et fonctions de l'approche par projet 

En quoi l'approche par projet crée-t-elle un contexte favorable à l'intégration de l'ordinateur ? Pour répondre à cette question, il importe, d'une part, de rappeler les caractéristiques de cette approche pédagogique et, d'autre part, d'examiner les possibilités nouvelles qu'offrent les technologies de l'information et des communications.

L'approche par projet n'est pas nouvelle et a presque toujours fait partie des pratiques pédagogiques. Toutefois l'apprentissage par projet, en tant que composante centrale de l'enseignement, ne remonte qu'à la fin du 19e siècle avec les expériences de John Dewey. Ce dernier s'est intéressé à l'approche par projet, ainsi qu'aux conditions nécessaires à sa mise en uvre en s'appuyant sur trois principes : 

tous les élèves, pour apprendre, doivent être actifs et produire quelque chose; tous les élèves doivent apprendre à penser ou, ce qui, pour Dewey, revient sensiblement au même, apprendre à résoudre des problèmes; enfin, tous les élèves doivent se préparer à vivre en société et, en conséquence, apprendre à collaborer avec d'autres personnes. 

Or la réalisation d'un projet en contexte scolaire permet précisément l'application de ces trois principes en raison des caractéristiques suivantes :  le projet a d'abord un but et celui-ci se matérialise généralement par une production concrète réalisée par les élèves qui se constituent ainsi comme les acteurs de leur apprentissage. Il s'agit donc d'une pédagogie centrée sur l'élève. De plus, parce qu'il se constitue comme le processus d'une construction en vue d'une réalisation finale, le projet implique une succession d'étapes au cours desquelles peuvent venir se greffer diverses activités pédagogiques. Cela nous amène vers une autre caractéristique importante de l'approche par projet, soit la multiplicité des tâches et des disciplines présentes à l'intérieur d'un même projet. Enfin, la réalisation d'un projet repose sur le travail d'une communauté d'apprenants qui doivent communiquer fréquemment et efficacement entre eux. La dimension sociale de l'éducation se retrouve ainsi au premier plan de l'approche par projet.

1.1 Le rôle de l'ordinateur dans le contexte de l'apprentissage par projet Qu'apporte donc l'ordinateur dans le contexte d'une classe en projet ? Comme nous l'avons déjà mentionné, il y est utilisé comme outil et ne constitue donc pas une fin en soi, même si sa maîtrise représente un avantage de plus pour les élèves et l'enseignant. En effet, qui dit outil, dit prolongement des mains et de la tête, ce qui signifie que l'ordinateur demeure sous la responsabilité de quelqu'un qui décide du moment et des conditions à l'intérieur desquels il jugera opportun d'y avoir recours. Ce rôle échoit aussi bien à l'enseignant qu'aux élèves. L'ordinateur et ses périphériques forment ainsi un formidable tremplin qui multiplie les possibilités d'échange et de traitement de l'information. L'accès à un réseau informatisé (Internet, intranet, courrier électronique,) permet désormais de dépasser les limites de la classe pour recueillir et échanger l'information. Cela s'avère d'autant plus utile que le projet nécessite déjà beaucoup de communication et de collaboration. L'ordinateur permet de faire circuler l'information écrite, les images et les sons. Il devient donc possible d'avoir recours à un plus grand nombre de médias, ce qui engendre des répercussions positives sur les plans de la pédagogie et de la motivation. Pour ce qui est du traitement de l'information, l'intérêt des outils technologiques apparaît encore plus évident, les élèves pouvant présenter des productions sous de multiples formes (document écrit, illustrations, pages web, ) avec une facilité parfois déconcertante. Enfin, le stockage d'informations permet de retracer l'évolution du processus de construction du produit final. Il reste donc à voir quels sont, concrètement, les effets de l'intégration de l'ordinateur en réseau dans une approche par projet.
1.2 Des élèves engagés Lorsqu'ils travaillent en projet, la plupart des élèves sont davantage motivés sur le plan intellectuel, l'approche par projet leur offrant la possibilité de s'engager activement dans leur propre apprentissage par le biais de réalisations concrètes. Ils sont intellectuellement plus actifs du fait qu'ils sont parties prenantes d'un processus de construction plutôt qu'agents passifs d'un exercice décontextualisé. Le projet donne donc un sens aux apprentissages des élèves. Ces derniers, qui se sentent ainsi sollicités, vont fréquemment au-delà de ce qui leur est demandé :
  on fait beaucoup de présentations, c'est comme ça qu'on étudie nos matières ça m'a motivé, ça m'a permis d'apprendre beaucoup de choses, puis c'est de la bouche des autres élèves ; ils connaissent leurs thèmes j'écoute les présentations, et j'ai à présenter un thème en particulierje pense que les élèves ont beaucoup plus de respect en écoutant les autres élèves parler c'est plus intéressant en PROTIC, on met de l'originalité dans les présentations ; on fait des petites mises en situation. Ça, c'est un autre petit coup de pouce. On intègre beaucoup de matières
  Le projet présente aussi des avantages en ce qui a trait à la durée des apprentissages s'y rattachant : il existe un début et une fin que l'élève est capable de voir venir et qu'il lui appartient d'administrer. L'élève est alors plus enclin à persévérer. 
  quand tu es par projet, il est vrai que ça demande plus de temps et plus d'effort, mais c'est toi qui apprends et tu apprends aux autres. C'est toi qui vas aller chercher les références et tu vas faire un peu comme ton professeur
  Par ailleurs, le stockage de l'information dans l'ordinateur lui permet de récupérer, de retravailler et d'élaborer un même travail. Enfin, la souplesse de l'approche par projet rend possible l'intégration d'une grande variété d'activités pédagogiques, ce qui plaît aux élèves et permet à l'enseignant de diversifier  son enseignement.
1.3 Des élèves chez qui l'on veut développer des habiletés de pensée, de 
communication et de collaboration
Parce qu'il se réalise en communauté d'apprenants, le projet veut nécessairement avoir des effets positifs sur le développement personnel et social de chaque élève et, de ce fait, s'inscrit bien dans la mission de l'école qui est de favoriser le développement intégral de chaque élève. Ainsi, parce qu'ils travaillent ensemble, les élèves sont amenés à développer leurs habiletés de communication.
  Souvent, on donne nos commentaires à la fin d'une présentation pour mentionner comment on pourrait faire pour s'améliorer une fois de plus. Nous disons parfois des choses négatives, car il faut tout simplement les améliorer. On soulève les points positifs qu'on devrait garder. Ces commentaires sont faits pour nous aider.
  Puisqu'un projet est le fruit d'un travail collectif, et donc d'un consensus, les élèves sont également conduits à développer leur habileté à négocier. Il leur faut alors apprendre à faire confiance aux autres et, nécessairement, à avoir confiance en eux-mêmes. En trouvant un champ d'action où ils se sentent utiles au groupe, que ce soit sur le plan technique ou académique, les élèves se sentent valorisés et, par le fait même, le projet pédagogique vise à développer une plus grande confiance en eux-mêmes en leur fournissant davantage d'occasions de se rendre utiles. 
 

Mes souvenirs, c'est avec mon copain à côté de moi, parce que moi, ma force c'est l'histoire, puis lui, il est vraiment bon en math. Donc, quand on avait des cours d'histoire, je l'aidais beaucoup, puis je lui donnais des conseils et je lui apprenais de la matière. Il faisait la même chose pour moi en informatique, donc ça m'aidait beaucoup comme ça. 

 quand tu es par projet, il est vrai que ça demande plus de temps et plus d'effort, mais c'est toi qui apprends et tu apprends aux autres. C'est toi qui vas aller chercher les références et tu vas faire un peu comme ton professeur 

  Si, par définition, le projet se réalise en collaboration, le travail personnel n'est pas pour autant négligé. Parce qu'ils doivent souvent accomplir des tâches complémentaires, les membres de chaque équipe doivent développer leur sens de l'organisation et leur sens des responsabilités. La latitude d'action préconisée par l'approche par projet, jointe à la nécessité d'une collaboration de tous, favorisent chez la majorité des élèves le développement de l'autonomie. Il faut dire que lorsque l'habitude du travail en collaboration s'installe dans une classe, la pression du groupe devient suffisamment forte pour ramener les " brebis égarées " dans le droit chemin.
  on se répartit les tâches au début du projet, puis on se donne une date de remise. Puis, rendus à cette date, on se donne tout le travail qu'on a fait. Puis ça arrive des fois qu'il y en a qui n'ont pas fait le travail. Donc il faut donner un surplus de temps, puis on a moins de temps pour une autre étape.
 

De même, cette liberté accrue laisse davantage de place à la création, réservant souvent d'agréables surprises à l'enseignant. Cela peut aller jusqu'à une modification de la forme du projet. Ici encore, l'ordinateur vient multiplier les possibilités de réalisations. Enfin, comme chaque élève doit affronter des situations diverses tant sur le plan intellectuel que social, il est progressivement amené à développer une grande capacité d'adaptation.

 Il existe bien sûr des élèves chez qui on observe une plus grande difficulté d'adaptation, mais la majorité d'entre eux est stimulée par le travail de collaboration inhérent au travail en projet. Quant à l'ordinateur,  sa présence devient une source de motivation supplémentaire parce qu'il facilite et stimule les échanges sous différentes formes : 

  Je travaille en m'amusant. Moi, je travaille beaucoup, beaucoup, mais je parle en même temps vu qu'on est en équipes, on peut parler on parle des recherches, tu peux aussi demander à quelqu'un comment faire des choses sur l'ordinateur. On apprend en équipes c'est plus intéressant que d'écouter le professeur en avant
 

tout en offrant une ouverture sur le monde qui dépasse le lieu réel de la classe. Il devient ainsi possible de communiquer avec l'enseignant ou avec des personnes-ressources de l'extérieur, tout comme il est possible d'accéder à des sources d'informations, de sons et d'images. Il est également intéressant de voir comment des élèves timides peuvent utiliser la communication par réseau pour poser des questions qu'ils n'oseraient soulever publiquement. Par ailleurs, de nombreux élèves finissent par joindre l'utile à l'agréable en communiquant entre eux à partir de leur foyer. Il est parfois surprenant de constater le nombre élevé d'informations à teneur strictement scolaire qui s'échangent en dehors du temps de classe. Enfin, l'utilisation de logiciels-outils permet aux élèves - le professeur ne s'en plaint guère - de réaliser des travaux propres et bien présentés.

 Si  l'approche par projet comporte certaines vertus, il faut cependant admettre que tous les projets n'ont pas le même effet sur la motivation des élèves. Les projets les plus réussis sont ceux qui se rapprochent des intérêts des élèves et laissent à ces derniers une certaine latitude de création. Il faut en outre souligner que la motivation engendrée par l'utilisation d'ordinateurs n'est ni systématique, ni toujours positive. Il faut accepter de passer par des étapes parfois désagréables. Au tout début, l'ordinateur apparaît comme une extension du Nintendo de la maison, mais il apparaît peu à peu comme une machine complexe qu'il faut apprendre à connaître. Certains s'en détournent, tandis que d'autres cherchent à en découvrir les circuits les plus obscurs. C'est le temps des "bogues", des virus et autres fantaisies informatiques. Ce n'est qu'à la troisième étape que l'enseignant en vient réellement à apprécier la présence de l'ordinateur en classe :  à ce stade, l'ordinateur devient secondaire pour presque tous les membres de la classe, cependant que ses applications se multiplient. 

1.4 Des apprentissages significatifs L'approche par projet jumelée à l'utilisation de l'ordinateur branché en réseau s'inscrit naturellement dans le courant constructiviste. Les élèves édifient progressivement leur savoir et leurs habiletés au cours de la construction du projet. L'aspect concret et multidisciplinaire de ce dernier a également l'avantage de rendre les apprentissages significatifs. Le savoir ne se présente plus comme une succession ou juxtaposition d'éléments distincts, dans l'esprit de l'élève, mais bien plutôt comme un réseau de relations: 
  C'est pas du par cur obligatoirement tout le temps, ce sont des matières intégrées aux projets. On voit les mêmes contenus qu'au régulier, sauf que c'est donné d'une façon plus intéressante.
  L'ordinateur joue, à cet égard, un rôle non négligeable. Par exemple, pour chaque projet d'histoire, des élèves devaient construire des organigrammes mettant en relation les différents concepts sur lesquels ils devaient travailler. En utilisant un logiciel prévu à cette fin (MS Organigramme hiérarchique, inclus avec Windows), il leur était possible de remanier rapidement et aisément les différentes relations entre les concepts, au fur et à mesure que leur compréhension se développait. Utilisé de cette façon, l'ordinateur facilite l'exécution de plusieurs opérations, sans pour autant empêcher la réflexion. Au contraire, il confronte quotidiennement les élèves à de nouvelles situations de résolution de problèmes. L'aspect communautaire de l'approche se trouve ainsi renforcé par l'usage du réseau informatique qui stimule et élargit les échanges. Cela dit, le simple fait de travailler en projet crée déjà, en raison de la multidisciplinarité et de la multiplicité des tâches, d'excellentes occasions de résoudre des problèmes.
  C'est nous qui structurons, cherchons dans les livres pour trouver l'information. Comme c'est nous qui apprenons par nous-mêmes, à la fin du projet, on peut apprendre aux autres ce qu'on a appris. Puis après, les autres nous apprennent ce qu'ils ont appris dans leur projet.
 

Parce que la réalisation d'un projet demande une grande organisation, il devient essentiel d'initier les élèves aux méthodes de travail intellectuel, ces fameuses "compétences transversales" autour desquelles s'articulent les nouveaux programmes pédagogiques. Apprendre à apprendre, voilà donc un aspect essentiel de l'apprentissage que permet l'approche par projet. Confrontés à la diversité des tâches et à une liberté intellectuelle accrue, les élèves n'ont d'autre choix que de mettre en pratique des méthodes de travail dont l'efficacité croît avec l'usage. L'ajout des TIC à une telle démarche permet de simplifier l'organisation, ne serait-ce qu'en donnant la possibilité d'ordonner et de mieux manipuler les informations. 

  Les premières expériences doivent être dirigées par l'enseignant. Toutefois, avec de la pratique, plusieurs élèves deviennent suffisamment habiles pour gérer la majeure partie de leur propre projet. De même, en développant des méthodes de travail efficaces et en partageant leur savoir entre eux, beaucoup d'élèves en arrivent à faire des travaux plus élaborés, des apprentissages plus poussés, ce dont ils sont conscients :

  on fait plus de travaux, on apprend plus rapidement c'est plus approfondi on apprend des choses, on ne fait pas juste de les connaître, on les apprend, on les approfondit, on creuse les sujets.
  Il n'en demeure pas moins que l'apprentissage par projet assisté par l'ordinateur branché en réseau constitue un défi de taille pour l'élève qui voit tous les aspects de sa vie en classe bouleversés. Les rôles, le temps d'apprentissage et les outils pédagogiques sont sans doute ceux avec lesquels il a le plus à composer comme l'illustre bien le témoignage suivant :
  Il faut s'adapter, se prendre en main, parce que c'est difficile au début, tu n'es pas habitué d'avoir quatre recherches en même temps moi, ça ne fait pas bien longtemps que j'ai réussi à me prendre en main. Ça fait trois ou quatre mois que je suis capable de faire mes travaux correctement. C'est surtout de s'adapter, puis d'être capable de s'organiser pour faire les travaux. 
  Si l'adaptation requiert du temps, comme le reconnaît cet élève, elle semble, en même temps, être le gage d'un enrichissement insoupçonné :
  Tu as une démarche de travail spécifique, mais ça, c'est une base. Tu vas toujours avoir la même démarche, mais il va y avoir des facettes qui vont se développer. Donc, tu pars avec une petite démarche, elle se développe, elle se développe, c'est un peu comme une toile d'araignée. 
 

L'école, telle que nous la concevons dans le cadre du programme PROTIC, n'a donc pas tant  la responsabilité d'instruire l'élève que, par et dans cette instruction, faire de ce dernier un individu responsable, c'est-à-dire un membre à part entière de sa collectivité. Dans cette perspective, les situations d'apprentissage que nous offrons aux élèves doivent conduire ces derniers à devenir des citoyens pleinement engagés dans le développement de leur communauté.

L'utilisation des technologies dans le contexte de l'apprentissage par projet constitue à cet égard un moyen privilégié en raison des possibilités de communication, d'accès à l'information et de partage de l'information qu'elle met en uvre. Toutefois, elle implique des coûts qui peuvent être jugés considérables. Ainsi, les parents des élèves inscrits à Protic doivent débourser près de 2 500$ pour l'achat de l'ordinateur portable de leur enfant. Quoique le paiement de cette somme puisse être réparti sur 5 ans, cela représente tout de même des frais de 500$ par année. Si, par ailleurs, le ministère de l'Education insiste sur la nécessité de former de manière à ce que "le système éducatif [puisse] prétendre avoir rempli adéquatement son rôle" alors il lui incombe, nous semble-t-il, d'assumer in facto, ses propres recommandations. 

Nous croyons, par conséquent, que plus nous serons nombreux et nombreuses à adhérer pleinement aux perspectives mises de l'avant par le MEQ, plus nous serons en mesure de réclamer de ce dernier la mise en place des conditions nécessaires à la poursuite de ces objectifs que nous estimons fondamentaux. Cependant il importe, dès maintenant, que nous fassions en sorte que ces objectifs se concrétisent progressivement au sein de nos classes par la mise en uvre d'un enseignement qui fait appel à un engagement réel des élèves dans leur démarche d'apprentissage. 

suite.gif (5102 octets)