Texte sur les fondements et les pistes de réponses se rattachant au cas de la problématique du bruit dans une classe branchée et/ou en projet


Gérer une classe dans laquelle les élèves sont en projet et, en prime, possèdent chacun un ordinateur branché en réseau amène son lot de difficultés. Parmi celles-ci, la gestion du bruit se retrouve haut placée parmi les situations qui peuvent faire hérisser les cheveux d'un enseignant. Trois facteurs majeurs sont susceptibles d'être à l'origine de bruits indésirables: la présence d'ordinateurs, la disposition physique de la classe et, bien sûr, l'approche par projet elle-même.

Dès les premiers instants où l'on met les pieds dans une telle classe, l'omniprésence des ordinateurs saute aux yeux…mais aussi aux oreilles ! C'est qu'il faut bien comprendre que ces petites boîtes grises ne sont pas silencieuses. En plus de posséder un lecteur de disque compact, l'ordinateur donne accès à de multiples sources sonores. Le bruit provenant de ceux-ci, bien qu'il soit des plus agaçants, est le plus facile à contrôler. C'est pourquoi, il n'est pas essentiel d'insister trop sur la question. En effet, les cas où l'utilisation des capacités sonores de l'ordinateur sont nécessaires à la réalisation d'une activité pédagogique sont plutôt rares. De plus, il est assez facile pour l'enseignant d'imposer ses règles, qui peuvent très bien en être l'interdiction complète. Bien sûr, lorsque les ordinateurs appartiennent aux élèves, il est plus délicat d'empêcher ceux-ci de posséder des éléments sonores (voir le texte se rapportant à la problématique de la propriété privée du portable), ce qui n'empêche cependant pas de leur interdire de les utiliser en classe. Il peut par contre être plus difficile d'éviter le bruit issu des différents périphériques de l'ordinateur, tels les numériseurs ou les imprimantes. Encore là, le contrôle peut se faire en déterminant des moments d'utilisation précis durant la période.

Ce qui est plus difficile à gérer, c'est le bruit inhérent au contexte créé par l'approche par projet. Comme dans n'importe quelle classe, il est nécessaire que l'enseignant trouve son seuil de tolérance. Cela dit, l'adaptation par rapport au contexte de classe plus classique est inévitable. De par sa nature même, le projet nécessite une certaine communication entre les participants et, souvent, une liberté de mouvement plus grande. C'est d'ailleurs une des premières difficultés rencontrées par les enseignants qui se retrouvent du jour au lendemain dans ce type de classe, comme le démontrent ces observations des professeurs du programme Apple Classroom of Tomorrow (ACOT):

"Habitués qu'ils étaient à des classes où les élèves restaient assis à leurs pupitres et où le maître s'installait en avant, certains enseignants se demandaient si les élèves faisaient ce qu'ils avaient à faire et apprenaient (…). Une enseignante s'interrogeait:"Je me demande si les élèves sont vraiment à leur affaire quand les enseignants ne font que circuler dans la classe. Je ne suis pas sûre que les élèves apprennent vraiment si je ne suis pas en avant de la classe à voir tout. Ça demande une adaptation." Une autre enseignante souligna: "C'est dur de laisser aux enfants la liberté dont ils ont besoin pour aller et venir dans la classe pendant les séances de travail individuel et collectif."" (1)

Que ceux qui croient que l'ordinateur déshumanise se rhabillent. La présence d'ordinateur dans un tel contexte, ne fait rien pour aider comme le prouvent ces résultats de recherche:

"L'un des résultats les plus frappants et les plus constants de cette expérience (ACOT) est que l'utilisation que l'on a faite de la technologie n'a pas isolé les élèves les uns des autres, mais a, au contraire, multiplié les relations entre eux." (2)

À première vue, tout cela ne semble guère attrayant et risque bien de décourager les disciples du silence absolu. Gérer une classe en projet demande d'abord de voir les choses d'une perspective différente qui ne peut être "approuvée" qu'une fois un projet terminé: quel climat de classe (conséquent de la pratique pédagogique choisie) favorise le plus l'atteinte des objectifs d'apprentissage ? Le silence ou le calme qui prévaut dans une classe est-il nécessairement synonyme d'apprentissage et de réussite ? Jusqu'à un certain point, le climat dans la classe est nécessairement différent selon que l'enseignant choisisse l'exposé magistral ou le projet.

En choisissant d'adopter l'approche par projet, l'enseignant doit donc s'attendre à ce qu'il y ait un peu plus d'action dans sa classe. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il doive tout accepter. Aussi doit-il d'abord connaître ses propres limites, son seuil de tolérance. Dans la situation décrite plus haut, il semble assez évident que l'enseignant a atteint le sien. Palardy (1993) considère d'ailleurs qu'un des principes de base pour régler les problèmes de gestion de classe est de se sentir à l'aise avec soi-même, avec les élèves et avec la matières que l'on enseigne. (3)

À quelques différences près, les façons d'intervenir ressemblent à celles qui sont valables partout. Cependant, quelques trucs, dont en voici quelques uns, peuvent être utiles d'une façon plus particulière à ce type de contexte. Il peut par exemple être plus efficace de trouver le moment propice pour les interventions, soit le début et/ou la fin de la période. Cependant, il arrive qu'il soit nécessaire de transmettre des informations en cours de période. Quelques moyens de ramener l'attention, tel qu'un signe quelconque convenu à l'avance (ex: fermer les lumières) peut s'avérer efficace. De plus, à partir du moment où un enseignant connaît mieux ses élèves, il peut circuler plus fréquemment près de ceux dont la tendance verbomotrice est de façon générale plus exacerbée. Enfin, lorsque des ordinateurs font partie du décor, il peut être efficace d'exiger que les écrans soient baissés (lorsqu'il s'agit d'ordinateur portatifs) ou de limiter les déplacements en réduisant le temps pour les impressions à des moments précis.

Qu'en pensez-vous ? Auriez-vous d'autres suggestions ?
 


(1) Sandholtz, Judith, Haymore, Cathy Ringstaff et David C. Dwyer, La classe branchée, enseigner à l'ère des technologies, Chenelière/McGraw-Hill, Montréal, 1997, p. 63.

(2) Grégoire inc., Réginald, Robert Bracewell et Thérèse Laferrière, L'apport des nouvelles technologies de l'information et des communications (ntic) à l'apprentissage des élèves du primaire et du secondaireRevue documentaire, RESCOL/SCHOOLNET, collaboration de l'Université Laval et de l'Université McGill.

(3) Gestion de classe 1(Notes de cours), Frédéric Legault, Université Laval, 1999, p.34