Consommer ou ne pas consommer ? La n'est PAS la question

Comme nous le savons tous, Abraham Maslow, éminent psychologue américain, a identifié un ordre de priorité dans la satisfaction des besoins humains. Au premier niveau se trouvent les besoins physiologiques tels que manger, boire, dormir, se vêtir, s'abriter contre les intempéries, etc. Ces besoins doivent être comblés chaque jour et c'est en grande partie, voire uniquement grâce à la consommation que nous pouvons le faire : nous devons utiliser de l'eau, acheter de la nourriture, des vêtements, des meubles, etc. En poussant plus loin le raisonnement, nous pourrions affirmer aussi que les autres niveaux de besoins (sécurité, amour et appartenance, estime de soi et accomplissement personnel) peuvent être aussi comblés par l'acte de consommer. Nous parlons alors plus souvent qu'autrement de " surconsommation ", phénomène que nous décrirons un peu plus loin.

Le lien entre ce constat et la création de la doctrine capitaliste n'est pas très difficile à faire. Le capitalisme prend naissance là où les besoins de l'homme peuvent devenir rentables monétairement. La majeure partie des pays industrialisés de la planète fonctionnent sous la doctrine capitaliste, depuis sa création suite à la Révolution Industrielle en Angleterre au 18e siècle. Et l'Amérique du Nord n'y échappa évidemment pas. Nous sommes toutes et tous des consommatrices et des consommateurs dans l'âme et probablement les meilleur(e)s de la planète. Le moyen le plus efficace de tenter le consommateur en nous est sans contredit la publicité. Longtemps avant Monsieur Bell et l'Agent Glad, la publicité existait sous forme verbale, écrite et visuelle. La publicité commerciale fut créée directement en réponse à la montée du phénomène de consommation. Elle est maintenant omniprésente avec les poussées technologiques du dernier siècle qui virent apparaître la radio, la télévision et plus récemment Internet, et qui font de la publicité leur principale source de vie.

Au cours des dernières décennies, nous avons été témoins de l'évolution de l'acte de consommer en une nouvelle forme, la surconsommation. Elle se définit essentiellement non par la quantité d'achats qu'un individu peut effectuer, mais par le déséquilibre émotif associé à l'acte d'achat. Elle met donc en cause les dimensions psychologiques du geste d'acheter telles les dimensions émotives du rapport à l'argent et à la consommation. Nous sommes donc depuis longtemps pris dans l'engrenage de la consommation. La question qu'il faut se poser maintenant est la suivante : notre consommation est-elle néfaste ou inutile à notre santé et à notre environnement ? Parce qu'il ne faut pas renoncer à la consommation, il faut tout simplement consommer intelligemment. Et la réponse au phénomène de surconsommation typique en Amérique du Nord est la consommation socialement responsable.

Il ne s'agit pas de renoncer à consommer et à acheter, mais de remettre en question notre mode de consommation compulsif. Il est souhaitable d'apprendre à consommer avec plus de modération et surtout d'être conscient de l'impact de nos gestes sur les personnes et sur l'environnement, ici et partout dans le monde. Consommer c'est d'abord choisir : choisir entre un T-shirt fait dans un atelier de misère et un autre fait dans un atelier qui respecte les droits des travailleurs(euses) ; choisir entre un café qui passe par la route conventionnelle des multinationales et un café équitable dont le prix juste garanti aux petits producteurs le droit à une vie décente; choisir entre les fruits et légumes fournis par des grandes multinationales et ceux produits localement, etc.

Par Guillaume Bouillon

Texte inspiré de l'article " La consommation socialement responsable, qu'est-ce que c'est ? ", paru dans Le Journal In-Terre-Actif, vol.5, no.1, octobre 2001, p.4.