La question de l'Afrique

" L'Occident n'a pas fait grand-chose pour aider l'Afrique ", mais les dirigeants africains n'en ont peut-être pas fait davantage, écrit Aminata Traoré dans son dernier essai, La viol de l'imaginaire, dont Lucie Pagé résume le contenu dans l'article " L'Afrique cassée ", publié dans le numéro du 1er août 2002 du magazine L'Actualité.

Le portrait de l'Afrique que dresse Mme Traoré est accablant : " l'aide au développement est un échec. Les écoles se vident. Le chômage est endémique. L'environnement est pillé et pollué à outrance. Les Africains meurent de maladies qu'ailleurs on guérit. Le sida se propage à un rythme exponentiel. Vingt-huit millions des 40 millions de sidéens du monde se trouvent en Afrique. Les médicaments ne leur sont pas accessibles ".

Mme Traoré accuse les organismes mondiaux d'être responsables de l'échec de l'aide au développement en Afrique. L'Organisation mondiale du commerce, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international sont dans sa mire. " Les pays riches utilisent les institutions financières internationales pour imposer leur vision libérale de l'économie. On prête de l'argent, mais à la condition que les pays en développement privatisent des sociétés d'État, accueillent les investissements étrangers ou libéralisent leur commerce. Des mesures désastreuses pour l'Afrique ", écrit-elle.

Par contre, les organismes mondiaux ne seraient pas les seuls responsables. Les dirigeants africains ont sûrement une part de responsabilité, d'après elle. Ce sont eux qui rendent des comptes aux organismes et " qui décident du sort du peuple à son insu ", dit-elle. Elle se demande aussi si les leaders africains sont des victimes ou des complices.

Le discours de Mme Traoré est très critique, mais les chiffres sont là pour l'appuyer. La pauvreté ne cesse de croître en Afrique : " de 1990 à 1998, le nombre d'indigents y est passé de 242 millions à 291 millions. Plus du tiers de la population africaine! ". Il faudra peut-être revoir notre façon d'aider les autres. Il semble que les pays industrialisés n'aient pas tous mis de côté leur chapeau de colonisateur, certains souhaitant toujours imposer leur façon de faire. Ce qu'il manque aux organismes mondiaux, selon Mme Traoré? L'humanisme. Le respect de l'autre et l'écoute, pourrait-on ajouter. Cela peut donc faire la différence entre le succès et l'échec d'un projet. Il faut en prendre note.


Par Martine Rioux