LE TRAVAIL EN ÉQUIPE
ET L'APPRENTISSAGE COOPÉRATIF
Le travail en équipe
suppose que l'on réunit des élèves pour
les amener à accomplir une tâche commune dans le
but d'atteindre un objectif commun. Ces deux éléments
font partie intégrante du travail en équipe exécuté
en coopération.
En outre, la méthode coopérative
inclut des composantes qui viennent promouvoir, au sein des équipes
de travail, l'interdépendance positive et la responsabilisation
individuelle, ce qui rend ainsi le travail plus efficace et plus
valorisant.
LES COMPOSANTES DE L'APPRENTISSAGE
COOPÉRATIF
Les composantes de l'apprentissage
coopératif constituent le cur de cette méthode
et établissent sa spécificité. Elles définissent
le cadre d'organisation du travail et structurent le contexte
et le contenu des activités d'apprentissage. Ces composantes
sont :
LE REGROUPEMENT DES ÉLÈVES
Les regroupements au hasard
On peut constituer les équipes
coopératives en utilisant, par exemple, des cartes à
jouer. Après avoir distribué les cartes, on demande
aux élèves de se regrouper selon qu'ils et elles
ont en main du cur, du pique, du carreau ou du trèfle.
On peut aussi leur remettre des cartons de couleur. Les équipes
se composeront alors d'élèves ayant des cartons
de même couleur ou de couleur différente.
Ce type de regroupement permet
de modifier facilement le nombre d'élèves par équipe
(précisément parce que ce regroupement ne se fonde
sur aucun critère d'affinité) tout en respectant
le nombre total d'élèves par classe.
Les regroupements au hasard
habituent les élèves à travailler avec plusieurs
autres élèves de personnalité différente,
reproduisant ainsi le travail en société, où
l'on choisit rarement ses coéquipiers et ses coéquipières.
Ce type de regroupement permet à l'élève
d'acquérir des habiletés sociales telles que la
tolérance, le respect et la valorisation des différences.
Les regroupements par affinités
Il est important, quelquefois,
de laisser les élèves se regrouper à leur
guise, surtout lorsqu'il leur faut exprimer des sentiments ou
discuter de sujets qui les touchent personnellement. Un climat
de confiance et de complicité doit régner lors
de tels échanges.
Les regroupements par proximité
Lors d'une étape précise
en cours d'activité, il peut s'avérer utile de
réunir deux élèves pour une courte durée
en vue de leur permettre de comparer ou de vérifier leur
travail, d'échanger de l'information et de se soutenir.
On demande à l'élève, par exemple, de discuter
avec son voisin ou sa voisine pour lui donner une explication.
On l'invite ensuite à écouter attentivement l'explication
de son ou sa partenaire. On peut aussi dire à l'élève
d'échanger sa copie avec son voisin ou sa voisine afin
de vérifier s'il reste des erreurs dans ses phrases. On
peut également lui proposer de faire relire son texte
par un ou une autre élève qui pourra vérifier
si tout est complet.
Les regroupements par champs
d'intérêt
On peut laisser les élèves
libres de choisir un sujet ou un thème qui les intéresse
ou l'on peut leur demander de choisir parmi des activités
proposées celle qu'ils et elles veulent préparer.
Puis on leur dit de se regrouper selon l'activité choisie.
On peut, bien sûr, d'abord placer les élèves
en équipe pour ensuite les inviter à choisir ensemble
l'activité à préparer. Il faut cependant
savoir que les deux types de regroupement permettent d'atteindre
des objectifs différents. Le premier respecte les goûts
des élèves et suscite leur motivation et leur engagement.
Le second permet aux élèves d'apprendre à
faire des concessions et les initie à la pratique du consensus,
lesquelles sont des habiletés de haut niveau. L'enseignante
ou l'enseignant doit bien circonscrire les objectifs de coopération
à atteindre avant de choisir le type de regroupement à
privilégier pour une activité donnée.
Les
regroupements formés par l'enseignante ou l'enseignant
Dès le départ,
l'enseignante ou l'enseignant se réserve le droit de former
les équipes. Cette règle de fonctionnement en apprentissage
coopératif doit être connue des élèves
et doit leur être expliquée. En effet, les élèves
doivent savoir que, pour certaines activités, il leur
est possible de se regrouper soit au hasard, soit par proximité
ou encore par affinités ou par champs d'intérêt.
Pour d'autres tâches, c'est plutôt l'enseignante
ou l'enseignant qui détermine la composition des équipes.
On informe donc les élèves que, pour certaines
activités, l'enseignante ou l'enseignant considérera
les forces de chaque élève afin de constituer des
équipes efficaces et productives.
En fait, le regroupement idéal
en apprentissage coopératif doit respecter une certaine
hétérogénéité. On considère
les forces du point de vue scolaire (si l'on forme des équipes
de quatre élèves, on choisira un ou une élève
de force supérieure, deux élèves de force
moyenne et un ou une élève faible); on prend aussi
en considération les diversités culturelles et
linguistiques ainsi que le sexe des élèves. L'enseignante
ou l'enseignant peut former des équipes pour une période
variant de deux semaines à une étape scolaire.
Lorsqu'il y a un regroupement à plus long terme, ces équipes
deviennent des équipes de base.
On tient compte aussi des
personnalités ou de toute autre considération qui
pourrait faciliter la formation d'équipes d'apprentissage
équilibrées. Il est donc très important
que l'enseignante ou l'enseignant planifie les regroupements
des élèves en ayant bien en mémoire les
objectifs à atteindre, puisque le regroupement soutient
cet objectif et influe sur la qualité du travail accompli.
On doit aussi s'assurer que le travail comporte des défis
et des objectifs à la mesure de l'ensemble de l'équipe.
De là l'importance, pour l'enseignante ou l'enseignant,
de former des équipes selon les critères qui viennent
d'être énoncés.
LA TAILLE DES ÉQUIPES
En apprentissage coopératif,
le nombre idéal d'élèves pour former une
équipe est de quatre parce qu'il permet de maximiser les
interactions. Cependant, les équipes de deux élèves
se prêtent bien aux échanges et aux tâches
précises de courte durée. Les équipes de
trois peuvent parfois poser des problèmes puisque, souvent,
on tend à isoler ou à ignorer la ou le troisième
élève. Le regroupement à cinq illustre bien
l'expression "être la cinquième roue du carrosse".
En règle générale, plus l'équipe
est nombreuse, plus il devient difficile de la diriger. Au primaire,
surtout, on recommande d'utiliser le regroupement à deux
qui peut facilement, si l'on associe deux équipes, devenir
un regroupement à quatre.
L'INTERDÉPENDANCE POSITIVE
ET LA RESPONSABILISATION INDIVIDUELLE
L'interdépendance positive
et la responsabilisation individuelle constituent les deux principes
sur lesquels repose la pédagogie de la coopération.
Ces principes la différencient du travail en équipe
traditionnel. Ils sont indissociables lorsqu'on parle du travail
en coopération. On peut cependant les définir séparément.
L'interdépendance positive
est présente au sein d'une équipe lorsque tous
les élèves ont le même objectif, participent
également et activement à l'exécution de
la tâche, partagent leurs connaissances, leur expertise
et leurs ressources en se respectant et en s'entraidant ainsi
que lorsque la tâche qui leur est proposée est structurée
par l'enseignante ou l'enseignant de façon qu'aucun ni
aucune membre de l'équipe ne puisse l'exécuter
individuellement.
La responsabilisation individuelle
est tangible au sein d'une équipe lorsque les élèves
se sentent responsables et de leur apprentissage et de la réussite
de l'équipe. Les élèves sont conscients
que leur propre engagement et leurs efforts en vue de soutenir
leurs coéquipiers et coéquipières sont essentiels
à l'atteinte des objectifs de l'équipe. L'enseignante
ou l'enseignant doit favoriser la responsabilisation individuelle
des élèves en assignant des rôles précis
à chaque élève, au sein des équipes,
lors de l'accomplissement d'activités coopératives.
L'IMPORTANCE D'ASSIGNER DES
RÔLES
Les rôles sont essentiels
au bon fonctionnement de l'équipe et à sa gestion.
En assignant des rôles, on s'assure de la répartition
équitable du travail. Les rôles servent aussi à
assurer et à contrôler la participation et la responsabilisation
de tous les coéquipiers et coéquipières.
Il existe quatre rôles types en apprentissage coopératif
:
- le ou la responsable du
matériel distribue
le matériel à ses coéquipiers et coéquipières
et doit le rapporter intact et complet à la fin de l'activité;
- le ou la responsable de
l'emploi du temps
s'assure que la tâche s'accomplit dans les limites du temps
accordé pour l'exécuter;
- l'animateur ou l'animatrice accorde le droit de parole et s'assure
que les discussions se déroulent harmonieusement, dans
le respect de tous et de toutes;
- le ou la secrétaire/porte-parole est responsable de la consignation
des résultats du travail de l'équipe et doit en
faire part à la classe.
Les rôles soutiennent
la tâche à accomplir. Il ne faut pas avoir peur
d'en créer de nouveaux, qui permettront soit de mieux
organiser le fonctionnement de l'équipe et du travail,
soit de faciliter les apprentissages et les interactions au sein
de l'équipe.
Les rôles sont, la plupart
du temps, distribués par l'enseignante ou l'enseignant
qui a le souci d'en assurer la rotation afin que les élèves
puissent se familiariser avec chacun des rôles. Ces derniers
aident les élèves à devenir plus responsables
quant aux tâches à accomplir lors du travail en
équipe.
Au primaire, plus particulièrement,
les jeunes élèves aiment beaucoup les rôles.
L'expérimentation en classe démontre que, lorsqu'on
décide d'assigner des rôles pour une activité
donnée, il faut le faire pour tous les membres de l'équipe,
sans exception! Sinon, on risque de démotiver les élèves
qui n'en ont pas parce que ceux-ci et celles-ci se sentent alors
moins engagés et parfois même rejetés. On
peut ainsi créer le rôle de responsable du silence,
qui a la tâche de s'assurer que le nombre de décibels
est acceptable lors d'une discussion! Une vérificatrice
ou un vérificateur de la compréhension peut
s'assurer que les consignes sont claires ou que les étapes
du travail sont bien déterminées.
LES HABILETÉS
COGNITIVES ET COOPÉRATIVES
Enseigner aux élèves
les habiletés de coopération qui vont les aider
à améliorer leurs relations interpersonnelles et
à acquérir des valeurs constitue le grand défi
de l'apprentissage coopératif. Les conséquences
de cet enseignement sur la qualité des interactions et
même sur la réussite scolaire des élèves
sont appréciables. Les habiletés de coopération
sont de trois types : 1) celles qui sont liées à
la gestion du travail en équipe (par exemple, "Se
déplacer sans bruit"); 2) celles qui sont rattachées
à la qualité des apprentissages (par exemple, "Pratiquer
l'écoute active"); 3) celles qui concernent les relations
interpersonnelles et sociales (par exemple, "Exprimer son
désaccord avec respect").
On enseigne généralement
les habiletés de coopération aux élèves
en demandant leur collaboration; ceux-ci et celles-ci sont amenés
à préciser les comportements et les attitudes
qui démontreront leurs efforts pour atteindre l'objectif
visé et les mots qu'ils emploieront pour se faire
penser réciproquement à respecter cet engagement.
Lors d'une activité
coopérative où les élèves sont regroupés
en équipe, on annonce dès le début l'habileté
à travailler et l'on concrétise cette habileté
en proposant des stratégies pour y parvenir. On établira
par exemple que l'élève qui veut pratiquer l'habileté
"Chacun son tour" n'interrompra pas la personne qui
parle mais demandera plutôt la parole en levant la main.
Il dira : "Excusez-moi, puis-je parler maintenant?".
Lorsque l'activité est terminée, on fait un retour
(objectivation) sur la pratique de l'habileté au sein
de l'équipe.
L'OBJECTIVATION
L'objectivation permet de faire
un retour sur les apprentissages et aussi sur la démarche.
Elle est une étape essentielle, car elle permet de boucler
la boucle et de faciliter l'assimilation ainsi que le transfert
des connaissances et des habiletés.
Les deux grilles d'objectivation
qui suivent sont utiles lorsqu'on veut effectuer un retour sur
une habileté de coopération précise. Elles
ont pour objet de susciter la réflexion individuelle de
même que la réflexion et l'échange en équipe.
Toute personne convaincue de la nécessité d'enseigner
les habiletés de coopération aux élèves
ne doit pas escamoter l'étape de l'objectivation, qui
favorise le développement social des élèves.
CHACUN SON TOUR |
ENCOURAGER |
J'ai essayé de ne pas interrompre mes coéquipiers
et coéquipières.
Toujours Quelquefois Rarement |
J'ai fait des efforts pour encourager les membres de l'équipe. |
Mes coéquipiers et coéquipières
m'ont aidé ou aidée à pratiquer l'habileté.
OUI NON |
- _____1_____2_____3_____ + |
La prochaine fois, nous devrions :
_____________________________
_____________________________
_____________________________
____________________________ |
Quels efforts ai-je faits ?
____________________________
____________________________
____________________________
_____________________________ |
LE RÔLE
DE L'ENSEIGNANTE OU DE L'ENSEIGNANT
Les enseignantes et les enseignants qui utilisent
l'apprentissage coopératif en classe voient leur rôle
se diversifier. Ils ne sont plus les uniques personnes à
transmettre leur savoir. Tantôt personnes-ressources, observateurs,
experts, facilitateurs, les enseignantes et les enseignants qui
vivent la pédagogie de la coopération planifient
et structurent leur enseignement de façon que leurs élèves
puissent apprendre mutuellement tout en s'entraidant et en partageant.
Il faut, pour cela, apprendre à déléguer,
à "lâcher prise", à faire confiance,
tout en conservant la maîtrise de la situation. Cette méthode
motivante et dynamique, qui concourt à rendre les élèves
plus autonomes dans leurs apprentissages, est tellement bénéfique
qu'il vaut bien la peine de s'y engager.
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